Ils rêvaient de faire des économies d'impôts grâce au dispositif immobilier défiscalisé Robien, mais l'affaire a plutôt tourné au cauchemar pour des milliers de propriétaires, aujourd'hui en difficulté financière ou surendettés.
Créé en 2003, ce dispositif vise à soutenir l'investissement locatif dans le neuf grâce à un allègement d'impôts, à condition pour le propriétaire de louer le logement pendant neuf ans.
Mais, parfois surévalués, porteurs de malfaçons ou encore placés dans des zones peu attractives et donc boudés par les locataires, une partie de ces biens immobiliers cumule les défauts.
Conséquence pour les propriétaires qui achètent le plus souvent sur plan: des pertes importantes, là où ils pensaient réaliser des économies.
"Beaucoup de gens sont dans des situations délicates car ils ont perdu l'avantage fiscal faute de locataire et ne peuvent pas revendre", relate Isabelle Faujour, directrice juridique adjointe de l'UFC-Que choisir.
Cette dernière estime que 5.000 à 10.000 personnes sont aujourd'hui en proie à des difficultés financières après l'achat d'un logement grâce au dispositif Robien.
La présidente de l'Association de défense des investisseurs et mandataires (Adim), Claudy Giroz, va plus loin: près de "29.000 investisseurs, pour beaucoup ruinés, surendettés, m'ont écrit parce qu'ils ont acheté un bien surfacturé pour lequel ils ne trouvent pas de locataire et perdent le bénéfice de la défiscalisation" des dispositifs Robien ou Borloo, quasi-similaires, affirme-t-elle.
Entre 2003 et 2008, près de 350.000 logements ont été construits pour être vendus dans le cadre du dispositif Robien, selon une estimation du Crédit foncier. Conséquence, l'offre locative est supérieure à la demande dans une soixantaine de villes de plus de 50.000 habitants, notamment Dijon, Le Mans, Perpignan, Mulhouse, Valence ou Clermont-Ferrand.
"Les soucis commencent à la livraison du bien; les gains ne sont pas à la hauteur dès le départ: les frais d'entretien sont deux fois plus élevés qu'annoncé, il y a des frais supplémentaires à chaque changement de locataire", raconte Emmanuel Georget, 36 ans.
Cet ingénieur, qui a investi 130.000 euros dans un appartement près de Toulouse, estime ses pertes à 30.000 euros, la somme qu'il espérait économiser.
Même désarroi chez Sylvie, une Lilloise de 45 ans. Après les déboires des premiers mois, elle s'est déplacée pour voir son bien: "Et là, on est atterré! La résidence est pleine de malfaçons, a des problèmes d'acoustique et son emplacement semble complètement hors de propos, en pleine forêt, à plus de 3 km du village".
"Là, vous réalisez que vous êtes propriétaire d'un bien surévalué à 600 km de chez vous avec la perspective de le garder pendant 10 ans et un prêt de 25 ans sur le dos".
Confrontés au manque de locataires, nombreux sont les propriétaires contraints de baisser leur loyer. Car, pour conserver l'avantage fiscal, il faut que l'appartement soit loué, et la vacance ne peut dépasser 12 mois.
"On se sent pris au piège. Au moment de l'achat, tout est présenté comme un placement financier et le support immobilier devient subsidiaire", explique Denis, 42 ans, qui vit à Orléans.
"Cela devait nous coûter entre 150 et 200 euros par mois et dans la pratique on est plutôt autour de 400 par mois!".
Sans compter l'épée de Damoclès de la revente.
"Comment faire pour revendre un appartement de mauvaise facture dans une zone à faible potentiel locatif sans perdre encore de l'argent et alors que tout le monde va vouloir revendre en même temps?", s'interroge M. Georget.