Alors que les yeux étaient rivés sur Amazon (O:AMZN), CDiscount est finalement le premier acteur internet pure-player généraliste à lancer un service de livraison express de produits frais à domicile en France, relançant le débat autour de ce secteur jusqu'ici peu exploité par la grande distribution.
Jeudi, le site de vente en ligne du groupe Casino, CDiscount, a musclé son offre alimentaire, jusqu'ici confinée à quelques références d'épicerie fine, proposant désormais la livraison à domicile en 1 heure et demi, en partenariat avec Franprix, également propriété de Casino.
Le service, pour l'instant limité aux villes de Paris, Levallois-Perret et Neuilly-sur-Seine, concerne 4.500 produits frais, secs, cosmétiques et d'entretien pour les courses du quotidien. Mais le distributeur ne cache pas son ambition de l'enrichir dans les prochaines semaines.
Cette livraison express sera possible à partir d'un montant minimum de 25 euros d'achat, et facturée 5,90 euros. Un abonnement à l'année permettant des livraisons illimitées, dont le tarif n'a pas encore été fixé, est également disponible.
Les colis seront préparés à partir des magasins Franprix, et livrés par Stuart, start up spécialisée dans la livraison ultra-rapide à pied ou en vélo.
"L'idée est de combiner les avantages du physique et du digital, en associant la forte audience d'un pure-player avec la proximité d'un réseau de magasins, c'est ça qui fait la force du modèle et permettra de le rendre rentable", ont expliqué Jean-Pierre Mochet, directeur général de CDiscount, et Emmanuel Grenier, président de CDiscount.
"C'est un véritable avantage concurrentiel que d'être les premiers à se lancer dans ce type de service d'ultra-proximité sur lequel les clients urbains pressés sont en vraie demande", ont commenté les deux hommes.
En effet, le segment de la livraison à domicile de produits frais reste encore peu développé en France. "C'est bien moins que ce qu'on peut observer aux Etats-Unis", avec Amazon qui teste son service Amazon Fresh dans trois villes depuis un an, "où en Grande-Bretagne où un acteur comme Ocado réalise près d'un milliard de chiffre d'affaires chaque année", explique Yves Marin, expert consommation chez Kurt Salmon.
Dans l'Hexagone, il ne concerne que quelques acteurs internet ultra-spécialisés, comme Monmarché.fr ou Carredeboeuf.fr, exploitant des marchés de niche. Quant à la grande distribution classique, elle a surtout concentré ses efforts sur le drive, permettant aux clients de commander leurs courses en ligne et de venir les retirer eux-mêmes en magasin.
Système U, avec Télemarket, avait tenté de lancer l'expérience du cybermarché à la française, mais a fini par fermer boutique en 2013, faute de rentabilité. Quant à houra.fr (Cora) ou ooshop ( Carrefour (PA:CARR)), leurs ventes restent encore très confidentielles, note M. Marin.
Les acteurs se sont jusqu'à présent tous heurté à la "problématique du dernier kilomètre", notamment en zone urbaine où faute d'entrepôts, la logistique est particulièrement couteuse (entre 13% et 75% du coût total, selon Xerfi).
Mais l'arrivée à saturation du drive en France, et les avancées de certains acteurs comme Chronosfresh (La Poste), qui propose depuis octobre la livraison de produits alimentaires frais et surgelés, ou même les AlloResto ou les Foodora, qui livrent à domicile les plats de restaurants, contribuent à "relancer le débat et la bagarre pourrait ne pas tarder à faire rage pour s'emparer de ce marché convoité de la clientèle urbaine CSP+", estime Yves Marin.
Depuis plusieurs mois, Amazon France fourbit ses armes, étoffant progressivement son offre alimentaire -- le site a lancé en octobre une boutique d'épicerie en ligne de 34.000 références - ou sa logistique -- le groupe vient de racheter Colis Privé, acteur spécialisé dans la livraison à domicile par coursier.
Quant à des acteurs comme Auchan ou Leclerc, "ils rêvent de compenser leur relative absence de magasins en Ile-de-France par un système de livraisons via le digital", note M. Marin. Auchan teste d'ailleurs depuis plusieurs mois un système de livraison de courses en point-relais à Paris, quant à Michel-Edouard Leclerc, il vient tout juste de lancer un service de livraison à domicile de vins.