La mobilisation sociale prend de l'ampleur chez Ryanair (LON:RYA), où les pilotes allemands se disent prêts à rejoindre un mouvement de grève historique prévu par leurs collègues italiens et irlandais afin d'améliorer leurs conditions de travail.
En trente ans d'histoire, la compagnie aérienne irlandaise à bas coût n'a connu aucune grève de pilotes, mais la menace n'a jamais été aussi proche à l'issue d'un automne tumultueux marqué par des milliers d'annulations de vols et l'explosion au grand jour d'un malaise social dans ses rangs.
"A partir de maintenant, à tout moment, des actions de grève sont à prévoir", a prévenu mardi le syndicat allemand de pilotes Cockpit.
Même s'il a précisé qu'aucune grève ne serait lancé lors de la période cruciale de Noël, le président du syndicat, Ilja Schulz, a appelé la compagnie à "manifester immédiatement sa volonté de négocier sur les conditions de travail et de rémunération", afin d'éviter un débrayage des plus embarrassant.
La compagnie dirigée par le volubile et controversé Michael O'Leary s'est toujours enorgueillie de conserver l'ordre dans sa maison à sa manière, interdisant toute affiliation syndicale à ses employés.
Mais depuis la rentrée de septembre et l'annulation soudaine de 20.000 vols entre mi-septembre et mars prochain, le mécontentement d'une partie de ses pilotes se fait de plus en plus bruyant.
Devenue ces dernières années la première compagnie européenne en nombre de passagers transportés, Ryanair a mis ces annulations sur le compte notamment de problèmes de plannings de vacances, mais plusieurs pilotes joints par l'AFP y ont vu un symptôme de rapports dégradés avec la direction, entraînant des départs vers d'autres compagnies.
De fait, des pilotes de Ryanair basés en Italie prévoient depuis la semaine dernière une grève de quatre heures le 15 décembre à partir de 12H00 GMT, et des collègues basés en Irlande ont voté lundi en faveur d'une grève, dont la date doit encore être fixée.
- Pénuries de pilotes -
Interrogée par l'AFP, Ryanair a déclaré mardi n'avoir "reçu aucune notification d'une quelconque grève de ses pilotes allemands", évoquant "un coup de pub" lancé par le syndicat d'une compagnie concurrente.
La direction avait réagi de façon similaire aux annonces en provenance d'Italie et d'Irlande.
Elle n'a publié aucune information laissant penser que son trafic pourrait être affecté par le mouvement du 15 décembre, qui coïncidera avec une grève des contrôleurs aériens italiens.
Les pilotes demandent de meilleures conditions de travail et de rémunération. Un autre point important demandé porte sur la création d'une instance pan-européenne de représentation du personnel, réclamée en octobre dans une lettre co-signée par une soixantaine de comités locaux de représentation du personnel (ERC) - instance de consultation exclusive utilisée aujourd'hui par Ryanair dans son vaste réseau européen.
La compagnie emploie une proportion importante de pilotes indirectement en tant qu'auto-entrepreneurs via une multitude de petites structures juridiques ad-hoc de droit irlandais, ce qui constitue aussi une source de frustration pour certains aviateurs n'ayant pas accès aux mêmes droits que les commandants et copilotes employés directement par la compagnie.
Afin d'apaiser le mécontentement, la direction de Ryanair a soumis ces derniers mois diverses propositions pour améliorer les rémunérations et la protection sociale via ses ERC, que certains d'entre eux ont refusé.
La compagnie a aussi nommé un nouveau chef des opérations, l'ancien directeur général de Malaysia Airlines Peter Bellew, avec pour première mission de veiller au bon fonctionnement des carrières des pilotes.
Les difficultés sociales de Ryanair interviennent au moment où les pilotes de ligne de toutes les compagnies sont en position de force pour négocier, au vu des départs en retraite des "baby boomers" qui limitent le nombre d'aviateurs au moment où le trafic mondial s'envole.
Sur le plan financier et de son trafic, Ryanair n'a pour l'instant pas souffert de façon majeure néanmoins et la compagnie prévoit de dégager un bénéfice après impôt compris entre 1,4 et 1,45 milliard d'euros lors de son exercice comptable 2017-2018.