L'onde de choc des attentats sur la fréquentation des salles de spectacles et les ventes de billets se fait toujours sentir un mois après les attaques jihadistes à Paris, menaçant la période des fêtes, habituellement faste pour le secteur.
Décembre, qui concentre habituellement 20 à 25% des ventes de l'année, s'annonce morose. Selon le Prodiss, qui regroupe 340 entrepreneurs du spectacle, les ventes, en chute de 80% la semaine qui a suivi les attentats du 13 novembre, affichaient encore un repli de 40% entre le 14 et le 30 novembre et restent en retrait par rapport à la normale.
Les professionnels du spectacle se sont mobilisés avec une vaste opération de communication: plus d'une centaine d'affiches vont remplacer vendredi leur titre par "Ma place est dans la salle". L'opération sera relayée par des messages vidéo et sur Twitter de célébrités comme Patrick Bruel, Gad Elmaleh, Juliette Gréco, Fabrice Luchini, Pierre Arditi...
"Tout le monde était conscient qu'il fallait faire quelque chose, exprimer notre solidarité et sortir des chapelles", a expliqué à l'AFP Philippe Lhomme, patron du Crazy Horse. Le cabaret subit une baisse de fréquentation de 35 à 50% depuis les attentats.
"Tout s'est arrêté le 13 novembre", rappelle Thierry Suc, producteur de Mylène Farmer, Valérie Lemercier et de la comédie musicale "Résiste". Le show inspiré par les chansons de Michel Berger et de France Gall, donné au Palais des Sports, vend aujourd'hui "un tiers de ce qu'il vendait chaque jour avant les attentats", estime-t-il.
A Mogador, "Cats" a constaté un impact de 15 à 20% sur ses ventes mais espère un taux de remplissage de 90-95% pour les fêtes, selon Laurent Bentata, directeur général de Stage Entertainment France.
- Spectacle jeunesse sinistré -
Le théâtre public a pu compter sur un public fidèle, pour partie constitué d'abonnés, mais souffre à travers le jeune public. L'interdiction des sorties éducatives en Ile-de-France, levée début décembre, a vidé les séances scolaires pendant les deux semaines qui ont suivi les attentats.
Les collégiens et lycéens, qui représentent de gros contingents dans les salles de théâtre public, ont aussi fait défection.
Durant le mois qui a suivi les attentats, ce sont 8.000 places d'enfants et de jeunes qui sont restées vacantes au Théâtre de la Ville, indique son directeur Emmanuel Demarcy-Mota.
Le Théâtre de la Ville lance son grand spectacle de fin d'année, "Alice et autres merveilles", le 28 décembre et M. Demarcy-Mota envisage d'en faire jouer des extraits dans les écoles.
A l'Opéra de Paris, "Vol retour", destiné au public de 4 ans et plus, n'accueille qu'environ la moitié des écoles qui avaient réservé initialement. A la Grande Halle de La Villette, le spectacle d'acrobates virtuoses XY a rempli la moitié des sièges prévus, en dépit d'une belle couverture dans la presse.
Les spectacles familiaux, comme "Carmen" par la compagnie Antonio Gades ont subi un contrecoup très net. La compagnie espagnole a réduit de 12 à 8 le nombre de ses représentations au Casino de Paris du 4 au 13 décembre.
"Do you speak djembé", spectacle tout public donné à la Cigale à Paris a vu ses ventes s'effondrer. "Le fait qu'on jouait dans une salle de concert a certainement pesé", estime son producteur Pascal Guillaume, qui a préféré arrêter le spectacle, qui sera repris en mai.
"Princes et Princesses", inspiré du film de Michel Ocelot (5 au 23 décembre à l'Olympia), a pâti de la frilosité du public familial. "On attendait 12 à 15.000 spectateurs, on sera dans le meilleur des cas à 6.000", relève Jacques Denis, directeur de la production.
L'Assemblée nationale a validé dernièrement la création d'un fonds, doté à ce stade de 4,5 millions d'euros, pour aider les entreprises du spectacle vivant à faire face aux conséquences des attentats.