par Benjamin Mallet
PARIS (Reuters) - Le conseil d'administration d'EDF (PA:EDF) a approuvé mardi un accord prévoyant une indemnisation du groupe par l'Etat français pour une fermeture anticipée de la centrale nucléaire de Fessenheim (Haut-Rhin) à laquelle les syndicats sont opposés.
Dans un communiqué, l'électricien public a précisé que le protocole conclu avec l'Etat comportait une indemnisation fixe initiale estimée à 490 millions d'euros, avec un versement de 20% en 2019 et de 80% en 2021, couvrant les coûts à engager après l'exploitation, notamment les dépenses de reconversion du personnel et de démantèlement.
Une part additionnelle variable donnera éventuellement lieu à des versements ultérieurs pour refléter le manque à gagner pour EDF jusqu'en 2041.
Selon une source proche du dossier, six voix se sont exprimées en faveur de cette indemnisation et six voix contre, le vote prépondérant du PDG Jean-Bernard Lévy ayant fait pencher la balance en faveur d'une approbation.
Les six représentants des salariés - fermement opposés à la fermeture de Fessenheim - se sont donc probablement exprimés contre l'indemnisation. Les six administrateurs d'EDF désignés par l'Etat ne pouvaient quant à eux pas voter en raison d'une situation de conflit d'intérêt.
EDF a rappelé que la fermeture de Fessenheim nécessitait un décret abrogeant l'autorisation d'exploitation de la centrale, pris sur demande de l'entreprise et qui prendrait effet lors de la mise en service de l'EPR de Flamanville 3 (Manche), prévue fin 2018.
Son conseil a toutefois subordonné cette demande d'abrogation à des autorisations nécessaires à la poursuite de la construction de l'EPR de Flamanville et de l'exploitation de Paluel 2 (Seine-Maritime), ainsi qu'à la confirmation par Bruxelles de la conformité du protocole d'indemnisation sur Fessenheim.
Il ne se prononcera donc sur la demande d'abrogation qu'une fois ces conditions remplies.
D'abord promise par François Hollande pour 2016, la mise à l'arrêt définitive des deux réacteurs de 900 mégawatts de Fessenheim est désormais prévue pour fin 2018, lorsque le réacteur de nouvelle génération EPR de Flamanville (Manche) entrera en service.
Dans un communiqué, Ségolène Royal souligne que cette centrale, mise en service en 1977, était située en zone sismique et que sa fermeture permettra "d'économiser les investissements qui auraient été nécessaires à (s)a prolongation".
La ministre chargée de l'Energie déclaré également avoir demandé à Sigmar Gabriel, le ministre de l’Économie et de l’Énergie allemand, de créer une commission franco-allemande pour mettre en œuvre les projets industriels nouveaux pour l’avenir du bassin d’emplois dans le Haut-Rhin.
Trois projets sont notamment à l'étude: Une usine franco-allemande de batteries de nouvelle génération, la candidature de ce territoire pour l’implantation d’une usine du groupe américain Tesla Motors de véhicules électriques et la mise en place d’une filière industrielle de démantèlement de centrales.
Les représentants des salariés d'EDF dénoncent de leur côté la perte de 2.000 emplois – un millier au sein de la centrale, plus les emplois indirects – et "le gâchis financier, industriel, social et climatique" que représenterait selon eux une fermeture anticipée.
"Le gouvernement a exercé une pression extraordinaire sur les administrateurs d'EDF indépendants et un chantage inacceptable sur l'entreprise en menaçant, entre autres, de ne pas autoriser le redémarrage de la centrale de Paluel", a estimé la CGT dans un communiqué.
"L'histoire n'est pas écrite et la FNME CGT continuera avec les salariés à mettre tout en œuvre pour empêcher ce qui serait un gâchis historique", a ajouté le syndicat.
François Fillon, candidat de la droite et du centre à l'élection présidentielle, s'est quant à lui engagé à "stopper la fermeture" de la centrale s'il est élu.
(Avec Geert De Clercq, édité par Jean-Michel Bélot)