par Balazs Koranyi
JACKSON HOLE, Wyoming (Reuters) - Des responsables de la Banque centrale européenne veulent débattre d'une hausse des taux directeurs de 75 points de base lors de la réunion de septembre compte tenu de la détérioration des perspectives d'inflation et en dépit des risques de récession, ont déclaré à Reuters cinq sources proches des discussions.
La BCE a relevé le 20 juillet ses taux de 50 points de base, une hausse d'une ampleur plus importante que la hausse d'un quart de point que la banque avait elle-même annoncée en juin.
Une nouvelle hausse d'un demi-point est anticipée pour la réunion du 8 septembre alors que l'inflation en zone euro se rapproche d'un taux à deux chiffres.
Bien qu'aucun responsable de la Fed n'ait publiquement préconisé une telle mesure, l'enchaînement des hausses de taux de 75 points de base de la Réserve fédérale américaine et la détérioration persistante des perspectives d'inflation dans la zone euro renforcent les arguments pour mettre sur la table des discussions une hausse de trois quarts de point le mois prochain.
"Je ne soutiendrai pas nécessairement 75 (points de base) mais il n'y a aucune raison pour que cela ne soit pas discuté", a déclaré l'une des sources. "Si la Fed l'a fait, il n'y a aucune raison pour que nous ne le mettions pas au moins sur la table".
Un porte-parole de la BCE n'a pas souhaité faire de commentaire.
Si une hausse d'une telle ampleur semble improbable compte tenu de l'opposition attendue des membres issus des pays du sud de la zone euro, ce genre de commentaires met en lumière une dynamique restrictive ("hawkish") dans les débats.
Isabel Schnabel, membre du directoire de la BCE, a affirmé la semaine dernière que les perspectives d'inflation ne s'étaient pas améliorées depuis juillet, donnant à penser qu'elle serait favorable à un relèvement important du coût du crédit en septembre.
L'indice des prix à la consommation a progressé de 8,9% sur un an en juillet, soit plus de quatre fois l'objectif fixé par la BCE, mais, fait plus alarmant, l'inflation dite de base, qui exclut les produits alimentaires non transformés et l'énergie, est également plus de deux fois supérieure à l'objectif.
"L'inflation est de plus en plus généralisée et les effets de second tour sont clairs", a déclaré une deuxième source. "Les perspectives sont bien pires que ce que nous avions prévu en juin, donc je suis d'accord pour dire (qu'une hausse de taux de) 75 points de base devrait au moins être discutée."
LA RÉCESSION N'EST PAS UN OBSTACLE
Les marchés intègrent une hausse des taux de 50 points de base lors de la réunion du 8 septembre et tablent sur des relèvements de 75 points de base pour les deux autres réunions de l'année.
"Pour moi, (un relèvement de) 50 points de base est le minimum. Nous aurons d'autres statistiques avant le 8 septembre mais pour l'instant, je vois des arguments solides en faveur de 75", a déclaré une troisième source.
La perspective d'une récession imminente dans la zone euro ne remet pas en cause la pertinence d'une remontée des taux plus importante, ont ajouté les sources.
La récession serait principalement due à un choc de l'offre - la flambée des prix de l'énergie et une pénurie de gaz russe - contre lequel la politique monétaire n'est pas très efficace.
"Si l'on n'augmente pas les taux, l'énergie deviendra-t-elle moins chère? Non. En fait, elle pourrait devenir plus chère car l'euro reculerait probablement et les prix de l'énergie sont libellés en dollars", ajoute une quatrième source.
"Mais si vous n'augmentez pas le taux, les prévisions d'inflation augmentent et nous devrons donc en faire davantage plus tard", a ajouté cette source. "Le risque de ne rien faire est bien plus grand".
Les sources reconnaissent néanmoins qu'une récession atténuerait probablement certaines pressions sur les prix et pourrait aider la BCE à revenir à son objectif d'inflation de 2%.
(Reportage Balazs Koranyi, version française Laetitia Volga, édité par)