Le gouvernement russe s'est dit prêt jeudi à dépenser neuf milliards d'euros pour son plan de lutte contre la crise devant soutenir l'activité économique, ralentie par la chute des cours du pétrole, sans expliquer où il comptait les trouver.
Le plongeon du rouble au plus bas niveau de son histoire face au dollar la semaine dernière a été suivi avec angoisse par les Russes qui craignent désormais une deuxième année de récession et de baisse de leur pouvoir d'achat, un revers après les progrès enregistrés en termes de niveau de vie en 15 ans de pouvoir de Vladimir Poutine.
Alors qu'il se débattait jusqu'à présent pour identifier les coupes possibles dans les dépenses et les sources de nouveaux revenus, le gouvernement a annoncé il y a quelques jours, en pleine déroute monétaire, qu'il préparerait au plus vite un plan de relance.
Son montant sera "de l'ordre de 750 milliards de roubles" (environ neuf milliards d'euros), a déclaré jeudi le ministre de l'Economie Alexeï Oulioukaïev, cité par les agences de presse russes.
Le pétrole et le gaz représentent la moitié des revenus budgétaires et une partie importante de l'activité économique. Or, le budget et les prévisions économiques pour cette année ont été bâtis sur l'hypothèse d'un baril à 50 dollars, alors que son prix est descendu à environ 30 dollars depuis le début de l'année.
La Russie, par ailleurs visée par des sanctions occidentales liées à la crise ukrainienne, a déjà vu son produit intérieur brut chuter de 3,7% en 2015 et le Fonds monétaire international attend un nouveau recul d'1% cette année.
L'an dernier, un premier plan de lutte contre la crise avait surtout consisté à renflouer les banques affaiblies par la dépréciation du rouble, mais aussi à subventionner certains agriculteurs et industriels et à augmenter les retraites.
- Financement "douteux" -
Cette fois, selon plusieurs journaux russes, le plan en cours de finalisation comprend 96 points répartis en quatre chapitres : aides aux régions, soutien aux secteurs les plus en difficulté (automobile, BTP) ou prioritaires (agriculture), mesures sociales et réformes structurelles.
Il comprendrait ainsi de nombreuses mesures destinées à améliorer le climat des affaires pour les petites et moyennes entreprises, en réduisant la myriade de contrôles actuellement effectués par de nombreux organismes et en renforçant l'indépendance des juges.
Certaines mesures auraient en revanche été rejetées, comme une hausse des retraites en plus de celle, modeste mais déjà prévue, et la limitation des salaires des dirigeants d'entreprises publiques.
Le plan pourrait faire mention de la nécessité d'entamer le débat concernant un relèvement de l'âge de la retraite, que Vladimir Poutine a récemment jugé inévitable à long terme.
Reste une inconnue de taille : comment financer ce plan alors que la chute des cours du pétrole plombe le budget et que le président a ordonné que le déficit budgétaire reste inférieur à 3% du PIB.
M. Oulioukaïev a souligné qu'une partie des sommes nécessaires figurait déjà au budget 2016 : 310 milliards de roubles (3,7 milliards d'euros) de crédits aux administrations régionales tentées de couper dans les prestations sociales. Pour le reste, il faudra trouver de quoi garnir un "fonds anticrise".
Pour l'économiste Dmitri Dolguine, de la banque Alfa, le plan qui se dessine "a peu de chances d'améliorer le moral de l'économie" car le montant annoncé "représente moins d'1% du PIB, bien moins que le plan de relance de 6% du PIB en 2008-2009", a-t-il relevé dans une note.
La tendance à la baisse du rouble semble pour l'instant enrayée, mais les experts ont désormais une certitude : la banque centrale, soucieuse d'éviter un nouveau dérapage du rouble capable d'emballer les prix, n'est pas prête à abaisser son taux directeur. Elle devrait le maintenir à 11% pendant sa réunion de vendredi, malgré les appels des milieux économiques à un abaissement pour encourager l'activité.
L'indice de confiance des milieux d'affaires mesuré par le cabinet MNI a plongé en janvier car, selon lui, "les inquiétudes concernant la faiblesse du rouble se renforcent et les robinets du crédit se sont encore fermés".