L'Inde espère renouer le plus rapidement possible avec 9% de taux de croissance économique et pense avoir vu le pire de la crise mondiale, a indiqué lundi le ministre des Finances en présentant le budget de la Nation.
Mais cette enveloppe pour l'année 2009-2010, qui fait la part belle aux dépenses publiques dans les infrastructures, l'agriculture et en faveur des centaines de millions de pauvres, fera encore gonfler le déficit budgétaire, déjà l'un des plus élevés d'Asie.
Fort de sa réélection triomphale aux législatives d'avril-mai, le gouvernement de centre gauche du Parti du Congrès veut absolument donner un coup un fouet à la dixième économie mondiale, frappée depuis un an par la récession venue d'Occident.
"Notre premier défi est de ramener au plus vite l'économie au taux de croissance élevé de 9% par an", a déclaré au Parlement le ministre des Finances Pranab Mukherjee, après avoir brandi la fameuse mallette en cuir censée contenir les documents budgétaires de l'Union indienne, une coutume héritée du colonisateur britannique.
Contaminée par la dépression née aux Etats-Unis et en Europe l'an passé, l'Inde a vu sa croissance ralentir au taux de 6,7% en 2008-2009 --sa plus mauvaise performance en six ans-- contre 9% un an plus tôt. Ce chiffre pourrait être divisé par deux en 2009-2010 (exercice clos fin mars), selon le Fonds monétaire international, voire dégringoler à 4%, d'après la Banque mondiale.
Plus optimiste, New Delhi compte sur au moins 7% cette année.
"Il est possible que les deux pires trimestres depuis la bourrasque financière mondiale de septembre 2008 soient derrière nous", a lancé M. Mukherjee en restant extrêmement prudent.
Car "même si l'environnement international montre des signes d'amélioration ces derniers mois, la reprise mondiale reste incertaine et nous ne pouvons donc pas nous permettre de baisser la garde", a prévenu le grand argentier du mastodonte asiatique, plaidant en direct à la télévision pour "la poursuite de nos efforts en vue de doper l'économie".
Pour ce faire, M. Mukherjee a dévoilé, comme attendu, plusieurs mesures de relance par la dépense publique, notamment dans les infrastructures routières, le talon d'Achille de l'Inde.
Reconduit en mai grâce aux votes des deux tiers des 1,17 milliard d'Indiens vivant en milieu rural, le Parti du Congrès n'a pas oublié l'indispensable développement de l'agriculture et des campagnes grâce à un accès facilité aux crédits.
Les aides aux pauvres en zone urbaine seront également augmentées. Championne mondiale des inégalités sociales, l'Inde compte une quarantaine de grandes fortunes se partageant 300 milliards de dollars de patrimoine et 620 millions de citoyens vivant avec moins de 1,35 dollar par jour.
"L'homme de la rue est au coeur de nos programmes", a assuré M. Mukherjee.
Mais après son discours, la Bourse de Bombay a plongé de 5%, des analystes regrettant que le budget laisse de côté toute réforme macroéconomique d'inspiration libérale. "Il n'y a rien dans ce budget qui puisse contribuer à doper la croissance. C'est une déception totale", a déploré Apurva Shah, du courtier Prabhudas Lilladher à Bombay.
Des économistes ont surtout fustigé le fait que, de l'aveu même de M. Mukherjee, les dépenses publiques vont faire grossir le déficit budgétaire de 6,2% du Produit intérieur brut (PIB) en 2008-2009 à 6,8% cette année. "Les chiffres prévus pour le déficit budgétaire sont aussi importants qu'inquiétants", a commenté Siddhartha Sanyal, expert chez le courtier Edelweiss Securities.