Face à la flambée des prix des matières premières et notamment du pétrole, le gouvernement a relevé mardi sa prévision d'inflation pour cette année en France, confirmant les craintes des ménages de voir leur pouvoir d'achat grignoté.
La Commission économique de la Nation, qui réunit deux fois par an économistes, syndicalistes et représentants institutionnels, "a arrêté une prévision d'inflation de 1,8% pour 2011", a annoncé la ministre de l'Economie Christine Lagarde dans un communiqué.
Dans le budget adopté fin 2010, le gouvernement tablait sur une progression des prix à la consommation de 1,5% cette année, mais la flambée des cours du pétrole et des matières premières l'a conduit à réviser cette prévision à la hausse, a-t-on expliqué à l'AFP dans l'entourage de la ministre.
Cet ajustement intervient au moment où les Français s'inquiètent de plus en plus face à la montée des prix.
Selon un sondage Viavoice réalisé en février, 56% des personnes interrogées, soit 14 points de plus que le mois précédent, estimaient que leur pouvoir d'achat diminuerait au cours des prochains mois. Près des trois quarts des Français redoutaient aussi une augmentation du prix du pain et de la viande.
La dernière enquête sur le moral des ménages, publiée vendredi par l'Insee, est venue confirmer ces craintes: les Français redoutent une forte inflation.
Or, une inflation de 1,8%, "historiquement, ce n'est pas beaucoup", nuance Mathieu Plane, de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
La nouvelle prévision du gouvernement correspond d'ailleurs à la définition de la stabilité des prix visée par la Banque centrale européenne, telle que rappelée lundi à Paris par son président Jean-Claude Trichet: "moins de 2% et proche de 2%".
Dans l'ensemble de la zone euro, l'inflation relevée ces derniers mois était, en glissement annuel, supérieure à celle enregistrée en France et à la barre symbolique des 2%. M. Trichet a ainsi suggéré au début du mois que la BCE pourrait relever ses taux d'intérêt directeurs dès avril.
Or, si on ne prend pas en compte les prix de l'énergie et d'autres prix très volatils, l'inflation est encore extrêmement basse. L'essentiel de l'inflation est donc "importée".
"Il n'y a pas du tout de spirale inflationniste, qui impliquerait des tensions sur les salaires, bien au contraire", assure Mathieu Plane.
Selon lui, "remonter les taux alors qu'il n'y a pas de vrai risque inflationniste n'aura d'une part aucun impact sur les cours du pétrole, et d'autre part, cela peut avoir un impact négatif sur l'activité dans une période où on met en place des plans d'austérité pour réduire les déficits".
Reste que la flambée du prix des matières premières a un effet sur le pouvoir d'achat, qui a déjà ralenti sa progression l'an dernier.
"Le pouvoir d'achat des ménages va progresser très faiblement cette année", estime Michel Martinez, de la Société générale.
Pour l'instant, la consommation des Français a résisté. Les dépenses de consommation des ménages en produits manufacturés ont même augmenté de 0,9% en février, a annoncé mardi l'Insee.
Mais "on reste dans un scénario de croissance molle, avec des moteurs faiblement dynamiques et très peu d'emplois créés", relève Mathieu Plane.
L'espoir vient, selon Michel Martinez, de l'épargne importante des Français, qui pourraient puiser dedans pour continuer de soutenir la consommation.