Après l'inculpation aux Etats-Unis du patron du FMI, Dominique Strauss-Kahn, le gouvernement grec perd un allié de poids à un moment crucial face à Berlin, la City et Wall Street qui poussent Athènes à procéder à une restructuration dure de la dette du pays.
Hué et conspué dans les manifestations à Athènes, le patron du FMI Dominique Strauss-Kahn, a, en 2010, obligé l'Europe à vaincre ses querelles pour sauver la Grèce de la faillite et éviter alors une probable explosion de la zone euro, en échange de mesures d'austérité drastiques.
Dimanche, M. Strauss-Kahn, arrêté par la police new-yorkaise pour agression sexuelle, a raté un rendez-vous crucial qui devait être consacré à la Grèce, avec la chancelière allemande Angela Merkel, fortement réticente l'an dernier à mettre la main au portefeuille pour aider Athènes et maintenir l'unité de la zone euro.
Au cours de la réunion devait être évoqué un éventuel deuxième paquet d'aide en échange de nouvelles mesures d'austérité et de privatisations supplémentaires, DSK affirmant il y a quelques jours encore que la Grèce pouvait s'en sortir sans restructurer sa dette, si elle menait à bien tous ses projets.
Au contraire, les marchés tablent depuis des mois sur une restructuration de la dette grecque. Selon un sondage, 85% des investisseurs internationaux jugent un défaut de paiement de la Grèce inévitable.
Dès dimanche, les médias grecs ont estimé que le gouvernement socialiste grec de Georges Papandréou avait "perdu un allié".
La télévision publique Net a rappelé que le chef du FMI "avait aidé la Grèce" lors des négociations avec l'UE pour décrocher l'aide au pays, face au nein des Allemands qui ont traîné des pieds pendant plusieurs mois en 2010 avant d'accepter de participer à un plan de sauvetage.
Parfaitement germanophone, le patron du FMI avait fini l'an dernier par trouver un accord avec la chancelière, en contrepartie d'une participation à l'effort du FMI, qui a mis sur la table 30 milliards d'euros pour aider la Grèce, le plus gros prêt jamais débloqué par l'institution.
Lundi, la presse grecque s'accordait pour juger que l'affaire DSK allait compliquer les efforts du gouvernement pour obtenir un nouveau soutien de ses partenaires face à ses difficultés financières.
"Athènes en détresse", jugeait le libéral Kathimérini, relevant que le patron du FMI était "à l'avant-garde des discussions récentes sur une possible nouveau prêt UE-FMI à la Grèce". "L'arrestation du Français semble compromettre ces négociations", ajoutait le journal.
"La femme de chambre bloque la Grèce", titrait en une Elefthérotypia (gauche), pourtant d'habitude très critique de la férule du FMI sur le pays, prédisant désormais "une ligne plus dure du FMI envers la Grèce".
Ce journal reflète ainsi l'ambivalence des Grecs envers DSK, incarnant à la fois une institution honnie et un europhile social démocrate capable de tenir tête à la seule loi des marchés.
Le journal de droite populaire Elefthéros Typos, opposé au plan d'austérité dicté au pays par le FMI et l'UE, était du coup le seul à céder à l'ironie: "La femme de chambre a résisté ... au violeur du FMI".
Dès fin 2009, l'ancien ministre français des Finances socialiste, devenu numéro un du FMI, avait répondu présent aux sollicitations du fraichement élu Georges Papandreou qui cherchait une solution pour sauver son pays, plombé par d'énormes déficits cachés par le précédent gouvernement conservateur.
"La situation en Grèce aurait certainement été meilleure si l'UE et le FMI avaient pu aider la Grèce plus tôt", avait regretté DSK le 4 avril dernier.
A l'époque, la presse populaire allemande conseillait aux Grecs de vendre leurs îles pour résorber leurs dettes.