La fusion des deuxième et troisième banques grecques, avec le soutien du Qatar, annoncée lundi, crée le premier établissement bancaire grec et lance la très attendue restructuration du secteur bancaire dans ce pays confronté à la crise de la dette souveraine.
La création de la nouvelle banque, AlphaEurobank, va engendrer la plus grande banque privée de Grèce et des Balkans, dotée de 146 milliards d'euros d'actifs, et plus de 1.300 succursales dans huit pays d'Europe du Sud-Est, indique un communiqué commun, selon lequel la nouvelle entité sera dans les trois premières positions en Bulgarie, à Chypre, en Roumanie et en Serbie.
Le fonds qatari Paramount, déjà actionnaire à hauteur de 5% du capital d'Alpha, prendra 17% de la nouvelle entité, en apportant 500 millions d'euros d'argent frais sous forme d'obligations convertibles.
"Nous annonçons un mariage qui créée la plus grosse banque de Grèce. Il s'agit d'un grand pas en vue de la rationalisation du système bancaire grec. Nous avons toujours dit qu'il y avait plus de banques que nécessaire en Grèce", a souligné le nouveau président Iannis Costopoulos, issu d'Alpha.
"Il s'agit du premier investissement majeur en Grèce depuis des années et d'un vote de confiance pour le pays. Nous pensons qu'il en amènera d'autres", a-t-il ajouté.
Les trois actionnaires principaux prévoient de renforcer le capital de la nouvelle entité à hauteur de 3,9 milliards d'euros au total, dont une augmentation de capital de 1,25 milliard début 2012.
Le processus de fusion doit être finalisé avant la fin de l'année.
"La participation du Qatar, qui bénéficie de la note AAA, nous donne une certaine force pour réduire nos coûts d'endettement", a ajouté Nicolas Nanopoulos, qui sera l'un des deux directeurs généraux du groupe aux côtés de M. Costopoulos.
Dans le détail de l'opération, les actionnaires d'Eurobank recevront cinq nouvelles actions Alpha pour sept titres Eurobank, donnant ainsi 57,5% du capital de la nouvelle entité aux actionnaires actuels d'Alpha et 42,5% aux actionnaires d'Eurobank.
Le ministre grec des Finances, Evangélos Vénizélos, a salué une "évolution positive". "Il est important que le Qatar participe et investisse en Grèce, envoyant à l'étranger un message de confiance" dans l'économie, a indiqué le ministre dans un communiqué.
Avant et après cette annonce, la Bourse d'Athènes, qui avait touché le fond en août en battant un record négatif de 15 ans, a flambé. Elle a clôturé en hausse de 14,37% sur une seule séance, repassant au dessus de la barre des 1.000 points.
La fusion annoncée "est une bonne chose", a déclaré à l'AFP Alex Koagne, analyste du secteur bancaire grec chez Natixis à Paris, pour "lancer la consolidation du secteur bancaire grec".
A New York ce week-end, la directrice générale du Fonds monétaire international Christine Lagarde avait appelé à une "recapitalisation urgente" des banques en Europe pour "couper la chaîne de la contagion" de la crise de la dette.
Il était temps. En août, les titres des banques grecques, comme d'autres en Europe, ont été lessivés en bourse, les marchés exprimant leurs doutes sur les chances de réussite du plan européen de sauvetage de la zone euro décidé le 21 juillet et d'adaptation du secteur bancaire à la crise de la dette.
Le plan européen prévoit une participation volontaire du secteur privé, dont la Grèce attend désormais confirmation, à la restructuration de la dette grecque, qui équivaut pour les banques à perdre 21% sur les obligations grecques qu'elles détiennent dans leurs coffres.
Ces pertes ont d'ores et déja été intégrées par les deux banques fusionnées, qui ont chacune annoncée dans la foulée lundi un résultat net dans le rouge au premier semestre en raison des provisions qu'elles ont dû inscrire dans leurs comptes pour couvrir leur décote souveraine.