L'Union Européenne vit "un moment crucial" de son histoire, a estimé jeudi à Rome le président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi, qui a rappelé la "nécessité" d'un pacte pour la croissance à côté du pacte de discipline budgétaire.
"Nous vivons un moment crucial dans l'histoire de l'Union" dont la crise de la dette a révélé les "faiblesses", a-t-il déclaré lors d'une intervention devant des centaines d'étudiants à l'université de la Sapienza.
"Nous sommes désormais arrivés au point où le processus d'intégration européenne a besoin d'un saut courageux d'imagination politique pour survivre" et "il faut que les gouvernements des pays membres de la zone euro définissent de manière conjointe et irréversible leur vision de ce que sera la construction politique et économique qui soutient la monnaie unique", a-t-il insisté.
Comme il l'a déjà indiqué à plusieurs reprises, M. Draghi a rappelé la "nécessité d'un +growth compact+", un pacte pour la croissance "à côté du +fiscal compact+", le traité renforçant la discipline budgétaire, car la croissance et la rigueur ne sont pas contradictoires.
"Il n'y a pas de croissance soutenable sans comptes publics en ordre" et il ne s'agit donc pas de creuser les déficits pour relancer l'activité dans la zone euro, a-t-il souligné.
Le pacte pour la croissance souhaité par M. Draghi repose donc sur des "réformes structurelles", notamment du marché du travail afin d'en augmenter la "flexibilité" et "l'équité".
Mais aussi sur la "relance des investissements publics" à travers le renforcement de la capacité de prêts de la Banque européenne d'investissement (BEI) et une meilleure allocation des fonds structurels européens, des pistes qui sont déjà sur la table de l'Union européenne.
Les dirigeants européens se sont réunis mercredi soir à Bruxelles pour discuter notamment des moyens de relancer la croissance - thème revenu au premier plan en particulier depuis l'élection de François Hollande en France - en vue du sommet crucial qui se tiendra les 28 et 29 juin.
Avant l'arrivée de M. Draghi à l'université de la Sapienza, une soixantaine d'étudiants a manifesté devant l'Université contre la politique de rigueur imposée aux pays de l'Union européenne.
Ils arboraient des banderoles et distribuaient des fac-similé de billets de cinquante euros sur lesquels on pouvait lire: "Non à la BCE, non à l'austérité".
Il a en revanche été accueilli triomphalement à l'intérieur de l'amphithéâtre, archi-comble.
M. Draghi participait à un hommage à l'économiste Federico Caffé, qui fut l'un des grands disciples de John Maynard Keynes, l'économiste britannique qui, dans les années 30 aux Etats-Unis, avait recommandé les programmes de grands travaux financés par l'Etat pour relancer l'économie.