Des milliers de gens sont descendus dans la rue jeudi en Grèce pour protester contre l'austérité et tenter de convaincre les dirigeants européens réunis à Bruxelles qu'un nouveau budget d'austérité n'est pas tenable pour le pays en récession grave.
Sous la bannière "FMI-UE dehors, effacement de la dette", des manifestants ont commencé de défiler dans le centre d'Athènes jeudi, alors que les services publics et les transports étaient fortement perturbés par le quatrième appel à la grève générale lancé par les syndicats depuis le début de l'année.
Aucun train ne roulait, aucun ferry ne partait vers les nombreuses îles du pays, aucun taxi ne circulait, la liaison ferroviaire entre Athènes et l'aéroport était suspendue, seul le métro et certaines lignes de bus fonctionnaient à Athènes, et deux stations du centre étaient fermées sur ordre de la police.
Dans les rues d'Athènes, la police recensait 25.000 manifestants dans différents cortèges en milieu de journée.
"La pauvreté s'étend, les emplois disparaissent et la Grèce coule. La Grèce va mourir si les mesures d'austérité tirées du mémorandum (avec les créanciers, NDR) ne s'arrêtent pas" dit Dimitris Sandis, employé d'une société pharmaceutique dans un des cortèges.
Plus loin Aliki Vassiloudi, 40 ans, journaliste au chômage, estime que les manifestants veulent avoir "des emplois, une dignité et par-dessus tout vivre comme des Grecs et non comme des inférieurs serviles".
De fait, la troïka des bailleurs de fonds du pays (UE-BCE-FMI) et le gouvernement de coalition dirigé par le Premier ministre conservateur Antonis Samaras se sont séparés mercredi sans accord total sur le programme d'ajustement économique du pays prévoyant de nouvelles coupes budgétaires d'au moins 11,5 milliards d'euros, à mettre en place en échange d'un prêt de 31,5 milliards d'euros.
La Commission européenne a publié un communiqué optimiste mercredi soir soulignant que les autorités grecques et la troïka "se sont mises d'accord sur les principales mesures nécessaires pour (...) ouvrir la voie à une finalisation de l'examen".
Lors du sommet européen jeudi et vendredi, la Grèce ne devait pas être évoquée, le rapport de la troïka préalable au déblocage des 31,5 milliards d'euros n'étant pas prêt.
Le Premier ministre conservateur Antonis Samaras espère néanmoins recevoir du sommet un signal de soutien européen pour faire accepter à son opinion le nouveau train de rigueur, dont le vote au parlement, à une date toujours indéterminée, risque de porter à son comble la tension sociale.
M. Samaras, qui participait à la réunion des dirigeants européens conservateurs à Bucarest mercredi soir, a estimé que dans la société grecque, où le taux de chômage atteint désormais 25%, "les gens ne sont pas des pièces détachées". "Nous devons maintenir la cohésion" a-t-il dit en promettant que son pays irait de l'avant avec les réformes requises par les partenaires européens et les bailleurs de fonds.
La Grèce, qui traverse sa cinquième année de récession consécutive, a demandé deux ans supplémentaires à ses partenaires pour mener à bien les réformes et réduire ses déficits, tandis qu'un débat idéologique pro ou anti austérité fait rage entre les économistes du monde entier sur la nature des remèdes à apporter au malade Grèce et au malade zone euro.
"L'Espagne et la Grèce sont en dépression, pas en récession. Et ceci est dû à l'austérité" a affirmé mercredi à New Delhi, Joseph Stiglitz, Prix Nobel d'économie, ancien conseiller du président américain Bill Clinton, et professeur à Columbia University à New York.