Vendeurs parlant mandarin, petits-déjeuners avec raviolis chinois et lait de soja, terminaux bancaires directement reliés à la Chine: les commerces et hôtels londoniens ont lancé une opération de charme pour séduire en temps de crise les touristes chinois au fort pouvoir d'achat.
Non seulement les Chinois représentent un marché en expansion - ils ont effectué quelque 70 millions de voyages à l'étranger l'an dernier, soit 20% de plus en un an - mais ils sont aussi des consommateurs invétérés. Une manne alors que l'économie britannique, à peine sortie de la récession au troisième trimestre, reste fragile.
"Oh mon Dieu, qu'ils dépensent !", lance Patricia Yates de l'office du tourisme britannique VisitBritain. "Le touriste chinois moyen dépense trois fois plus - 1.600 livres (2.600 dollars, 2.000 euros) - que le touriste moyen au Royaume-Uni", précise-t-elle à l'AFP.
Alors évidemment, "ils sont les bienvenus dans les magasins, où la demande locale s'est tassée".
Le temple du luxe Harrods, dans le quartier huppé de Knightsbridge, emploie 70 personnes parlant mandarin et dispose de plus de 100 terminaux bancaires connectés à des banques chinoises permettant d'éviter les frais de transaction.
Les Chinois "sont à l'affût des derniers produits en édition limitée", explique une porte-parole de Harrods. En tête de liste: la bijouterie, la mode et les vins.
Sur Oxford Street, artère principale du shopping à Londres, Harry Gao, manteau de fourrure et baskets dorées, est à l'affût d'articles de designers. "Londres est la capitale de la mode", affirme cet étudiant en mode originaire de Wenzhou, dans l'est de la Chine.
Un total de 149.000 touristes chinois ont visité le Royaume-Uni l'an dernier et dépensé quelque 240 millions de livres. Un record pour la Grande-Bretagne, mais un chiffre faible si on le compare à d'autres pays européens, notamment la France qui a accueilli près d'un million de touristes chinois l'an dernier.
"Nos rivaux européens font beaucoup mieux que nous", reconnaît Patricia Yates. "Nous voulons vraiment pénétrer le marché chinois", ajoute cette responsable de la stratégie commerciale de VisitBritain qui a envoyé sa plus forte délégation à Shanghai le mois dernier.
A l'hôtel Landmark cinq étoiles de Londres, les clients ont désormais le choix entre le traditionnel petit-déjeuner britannique, avec oeufs au plat et saucisses, et une bouillie de riz accompagnée de lait de soja. Et "les réactions sont très favorables", selon le responsable marketing de l'établissement de luxe, Yan-Ping Mew.
Landmark attribue aussi, dans la mesure du possible, des chambres aux troisième et huitième étages, considérés comme des numéros porte-bonheur.
La difficulté à obtenir un visa britannique est cependant souvent montrée du doigt pour expliquer le nombre relativement faible de touristes chinois au Royaume-Uni. Ces derniers peuvent se rendre dans 25 pays européens avec un seul visa Schengen, mais doivent se procurer un autre visa pour le Royaume-Uni, au prix de nombreuses tracasseries administratives.
Début décembre, la ministre britannique de l'Intérieur Theresa May a confirmé que le gouvernement réfléchissait à introduire pour les Chinois des demandes de visa sur internet et un service express de visa pour certains visiteurs chinois.
Dans le même temps, le gouvernement a dépensé 8 millions de livres pour attirer 233.000 visiteurs supplémentaires par an d'ici 2020.
Des initiatives qui ont déjà porté leurs fruits pour le "Boxing Day", mercredi, qui a marqué le début des soldes. La fréquentation des magasins était ainsi en hausse de +31,3% dans le centre de Londres, autour d'Oxford Street.
De bons résultats attribués aux acheteurs chinois et du Moyen-Orient qui "auront un impact d'une grande valeur pour les soldes de cette saison", selon Richard Brown, de la société Global Blue spécialisée dans les achats en détaxe.