La banque centrale du Japon (BoJ) a décidé jeudi d'accélérer et amplifier ses mesures d'assouplissement, afin de doubler la base monétaire en deux ans pour atteindre dans le même temps son objectif d'inflation de 2%, comme s'y est engagé le nouveau gouverneur, Haruhiko Kuroda.
L'institut d'émission veut montrer qu'il est prêt à "faire tout ce qui peut l'être" dans un sens quantitatif et qualitatif pour extraire le pays de la déflation qui bride son activité économique depuis une quinzaine d'années.
"Nous avons pris les dispositions requises pour le moment, mais l'économie et les finances sont des choses vivantes et nous n'hésiterons pas, en temps voulu, à prendre d'autres mesures qui s'avèreraient nécessaires", a déclaré M. Kuroda lors de sa première conférence de presse suivant une réunion des neuf membres de l'institut d'émission.
Et d'insister : "Nous sommes résolus à prendre toutes les mesures que nous pouvons envisager afin d'atteindre dans un délai d'environ deux ans l'objectif d'inflation de 2% qui correspond à la stabilité des prix", a-t-il expliqué.
La BoJ va passer à une politique de contrôle de la base monétaire, au lieu de seulement encourager un taux d'intérêt entre 0 à 0,1% au jour le jour. Cette mesure a été adoptée à l'unanimité des neuf membres.
La base monétaire, c'est-à-dire l'argent liquide et les réserves obligatoires des banques, devrait ainsi monter à 270.000 milliards de yens (2.210 milliards d'euros) à la fin de 2014, contre 138.000 milliards fin 2012.
Les participants ont aussi voté une augmentation des achats exceptionnels d'obligations d'Etat, en étendant la gamme à toutes les maturités, y compris celle de 40 ans.
Ce nouveau dispositif se substituera au programme de rachat d'actifs étatiques qui avait été décidé il y a plusieurs années et amplifié à maintes reprises.
"Les achats d'obligations d'Etat n'ont pas pour but de combler le déficit budgétaire", a pris soin de souligner la banque, alors que l'Etat vit en grande partie à crédit.
Le taux d'intérêt sur l'obligation d'Etat japonaise à 10 ans a néanmoins chuté à 0,425% peu après, son plus bas niveau historique.
La BoJ a décidé en outre d'augmenter ses achats de titres plus risqués comme les fonds cotés en Bourse (ETF) et les titres de fonds communs immobiliers japonais (J-REIT).
Ces décisions visent à "encourager un déclin des taux d'intérêt sur toute la ligne" et créer un contexte qui facilite les prêts d'argent aux particuliers et entreprises afin de les inciter à investir pour dynamiser l'activité.
Le comité de politique monétaire s'est réuni mercredi et jeudi pour la première fois sous la présidence de M. Kuroda, gouverneur depuis le 20 mars.
Se montrant moins crispé devant les journalistes que son prédécesseur Masaaki Shirakawa, dont il jugeait la politique trop timorée, M. Kuroda a promis de passer à la vitesse supérieure au côté de ses deux adjoints nouvellement nommés.
La BoJ s'est engagée a poursuivre cette nouvelle politique "aussi longtemps que nécessaire dans le but d'atteindre un indice d'inflation de 2% et de maintenir ce niveau-cible de façon stable".
Les annonces ont été bien accueillies par les investisseurs: le Nikkei de la Bourse de Tokyo a terminé en forte hausse de 2,20% et le yen a chuté face au dollar et à l'euro.
"Kuroda a montré aujourd'hui que la Banque du Japon avait changé", a expliqué à l'AFP Yoshikiyo Shimamine, économiste au Dai-ichi Life Research Institute, pour qui l'annonce de jeudi "a dépassé les attentes du marché".
Ces nouvelles mesures s'incrivent dans le cadre d'un accord passé avec le gouvernement pour agir de concert afin que l'économie japonaise redevienne prospère, alors qu'elle va cahin-caha depuis des années, étant vulnérable aux variables extérieures et affaiblie par une morosité intérieure.
Le Premier ministre de droite, Shinzo Abe, dont la politique économique bénéficie pour l'heure d'un large soutien public, a fait pression depuis des semaines en ce sens et nommé M. Kuroda pour que ses desiderata soient mis à exécution.