Les inégalités ont progressé dans la grande majorité des pays avancés, a averti lundi l'Organisation internationale du travail (OIT), qui dénonce l'augmentation des salaires des hauts dirigeants et des profits des grandes entreprises.
Alors que l'économie mondiale se remet lentement de la crise financière, la plupart des pays émergents et en développement connaissent une hausse de l'emploi et une réduction des inégalités de revenus, contrairement aux pays à revenu élevé, indique le rapport annuel de l'OIT sur le travail dans le monde.
Les inégalités de revenus ont augmenté dans les économies avancées au cours des deux dernières années, dans le contexte d'une hausse du chômage mondial: il manque plus de 30 millions d'emplois en 2013 pour retrouver le niveau d'avant la crise de 2008 et le chômage passera de 200 millions aujourd'hui à près de 208 millions en 2015, selon l'OIT.
Les inégalités de revenus ont, elles, augmenté entre 2010 et 2011 dans 14 des 26 économies avancées étudiées, y compris en France, au Danemark, en Espagne, et aux Etats-Unis.
"Les chiffres présentent une évolution positive dans de nombreuses régions du monde en développement mais ils dressent un tableau inquiétant pour de nombreux pays à haut revenu, malgré la reprise économique", a déclaré le directeur général de l'OIT, Guy Ryder.
"Dans certains pays européens en particulier, la situation commence à mettre à rude épreuve le tissu économique et social", a-t-il ajouté.
Diminution de la taille des classes moyennes
Ainsi, le rapport montre que les classes moyennes de nombreuses économies avancées régressent, un phénomène nourri notamment par le chômage de longue durée, la détérioration de la qualité de l'emploi et les travailleurs qui abandonnent le marché du travail.
En Espagne, les ménages à revenus intermédiaires ne représentent plus que 46% des ménages à la fin de 2010 contre 50% en 2007. Aux Etats-Unis, les 7% les plus riches de la population ont vu leurs revenus nets moyens augmenter pendant les deux premières années de la reprise, tandis que les 93% restants ont vu leur revenu net décliner.
Cette diminution de la taille des classes moyennes -un marché habituellement important en termes de pouvoir d'achat- peut remettre en cause les objectifs d'implantation des entreprises, a souligné Raymond Torres, directeur de l'Institut international d'études sociales de l'OIT.
L'OIT relève par ailleurs que l'incapacité à transformer les profits en investissements dans les pays industrialisés ralentit la reprise de l'emploi.
Alors que la part du profit dans l'économie totale a augmenté entre 2007 et 2012 de 3,4 points de pourcentage dans les pays du G20 à revenu intermédiaire et de 2,2 points de pourcentage dans les pays du G20 à haut revenu, l'investissement a reculé de 3,6 points, explique l'OIT.
Par contre, le rapport établit que la rémunération des cadres dirigeants a, une nouvelle fois, grimpé en flèche dans beaucoup de ces pays, après une courte pause au lendemain de la crise mondiale.
En Allemagne et à Hong Kong, par exemple, la rémunération moyenne d'un président directeur général de grandes sociétés a augmenté de plus de 25% entre 2007 et 2011, les salaires des dirigeants en Allemagne équivalent à 150 à 190 fois celui du salarié moyen. Aux Etats-Unis ce chiffre atteint 508 fois celui du salarié moyen en 2011.