Les milieux économiques suisses se sont unis lundi, dans une démarche exceptionnelle, contre une initiative du parti de droite populiste UDC pour limiter l'immigration et qui sera soumise au vote populaire le 9 février.Pas moins de 12 organisations patronales ont lancé un appel commun lundi pour dénoncer cette initiative appelée "contre l'immigration de masse", qui "crée des problèmes sans proposer des solutions".Ce texte de l'UDC, premier parti politique suisse, est aussi rejeté par le gouvernement et le parlement.Selon un sondage effectué en décembre 2013, l'initiative de l'UDC serait rejetée par le peuple, car elle ne serait soutenue que par 36% de la population.L'UDC a aussitôt réagi lundi à cette prise de position en dénonçant ces "fonctionnaires de l'économie mus par leur seul intérêt propre" et qui "refusent de parler des problèmes sociaux et économiques résultant de l'arrivée chaque année en Suisse de 80.000 nouveaux habitants".L'UDC ne "veut ni la fin de l'immigration, ni dénoncer les accords de libre-circulation", indique encore un communiqué du parti."La Suisse doit pouvoir décider à nouveau elle-même qui peut s'installer dans notre pays, et quand il doit partir", a encore ajouté le parti."Un marché du travail très performant"De leur côté, les milieux économiques ont indiqué lundi qu'au cas où le peuple suisse voterait "oui" le 9 février, la politique bilatérale entre la Suisse et l'UE serait "mise en péril", alors qu'il s'agit d'un système qui a profité "largement à l'économie suisse et à sa population".Les organisations Economiesuisse, l'Union patronale, l'Union suisse des arts et métiers (USAM), l'Union suisse des paysans, hotelleriesuisse, Swissmem, la Convention patronale de l'industrie horlogère, scienceindustries, H+ les hôpitaux de Suisse, la Fédération textile suisse, l'Association suisse d'assurances et ICTswitzerland ont tenu lundi une conférence de presse commune à Berne pour exprimer leur opposition à ce texte.Les douze représentants des patrons suisses ont tous dépeint les conséquences désastreuses qu'aurait pour l'économie une acceptation de l'initiative de l'UDC. "Nous devons notre succès à un marché du travail très performant et florissant", a souligné le président de l'Union patronale suisse Valentin Vogt, cité par l'agence suisse ATS. L'initiative de l'UDC demande le retour de contingents de main-d’œuvre étrangère, qui avaient été supprimés avec les accords de libre-circulation entre la Suisse et l'UE, afin que les Suisses aient la priorité sur le marché du travail.Le texte prévoit que ces limites s'appliqueraient également aux frontaliers et aux requérants d'asile.La Suisse est un des pays européens comptant le plus d'étrangers, soit 23% de l'ensemble de la population ou 1,9 million de personnes.Selon les derniers chiffres publiés, entre septembre 2012 et septembre 2013, le nombre d'étrangers a progressé de 3,3% en Suisse. La majorité de ces étrangers (66%) sont des ressortissants de l'UE ou de l'AELE.Lundi, le représentant du secteur de l'hôtellerie a rappelé l'importance de la libre-circulation pour la branche, qui peut facilement embaucher au sein de l'UE.Les hôpitaux et les cliniques suisses sont eux aussi tributaires des spécialistes étrangers, a indiqué pour sa part le représentant du secteur.A fin 2012, près d'un quart des médecins travaillant en Suisse venaient d'Allemagne.Tous les représentants économiques ont dépeint les difficultés à recruter du personnel. L'agriculture serait particulièrement pénalisée par un retour au régime des contingents, a estimé le directeur de l'Union des paysans Jacques Bourgeois.Les accords bilatéraux sont cruciaux aussi pour les entreprises de l'industrie des machines, qui réalisent plus de la moitié de leur chiffre d'affaires en Europe, a précisé le président de Swissmem Hans Hess.La fin de la voie bilatérale aurait probablement des conséquences fatales sur la "success-story" helvétique, a estimé pour sa part le représentant de l'Association suisse d'assurances.