Le projet de réforme du marché de l'électricité, qui doit bientôt passer devant le Parlement, pourrait provoquer des hausses des tarifs de l'électricité comprises entre 7% et 11% selon des projections de la Commission de régulation de l'Energie (CRE), démenties par le gouvernement et EDF.
C'est un sujet récurrent pour le groupe public d'électricité. A chaque fois qu'il en a l'occasion, EDF tente d'obtenir du gouvernement une revalorisation de ses tarifs de vente, qu'il juge trop faibles.
En juillet 2009, l'ancien patron Pierre Gadonneix avait réclamé une hausse de prix de 20% sur 3 ans, ce qui lui avait coûté son poste.
"Cette question va se reposer", avait-il prédit juste avant de quitter ses fonctions.
En janvier, le quotidien Les Echos avait fait état de "projections internes" à EDF qui envisageaient une hausse des tarifs aux particuliers de l'ordre de 24% entre 2010 et 2015, une information démentie par EDF.
Mercredi, c'est la CRE, le gendarme du secteur, qui s'est livré à l'exercice des projections en se basant sur les demandes formulées par EDF dans le cadre de la réforme du marché de l'électricité.
Cette réforme, baptisée projet de loi "Nome" pour Nouvelle Organisation du Marché de l'Electricité, a été présentée mi-avril en Conseil des ministres, avec pour objectif de favoriser la concurrence dans un secteur ultra-dominé par l'ancien monopole public.
Elle fait obligation à EDF de revendre jusqu’à un quart de la production de son parc nucléaire à ses concurrents (GDF Suez, Poweo, Direct Energie...), afin de permettre à ces derniers d'accéder à une électricité à bas coût.
Le patron d'EDF, Henri Proglio, s'était initialement montré fermement opposé à ce projet. "Accepter un dispositif de ce type, ce serait accepter que la +boîte+ ne vaille plus rien", avait-il dénoncé en novembre.
M. Proglio a depuis lors largement revu sa position pour focaliser la négociation sur le prix auquel EDF vendra son électricité à ses concurrents.
Il réclamait ainsi en mars que le groupe public "ne soit pas contraint de vendre en dessous du prix de revient".
Mercredi, M. Proglio a été plus précis, lors d'une audition à huis clos devant la Commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale, en réclamant un tarif minimum de 42 euros par mégawatheure (MWh), a indiqué une source parlementaire à l'AFP.
"En-dessous, ça ressemble à du pillage", a-t-il déclaré, selon la même source.
Or, selon les projections de la CRE, il faudrait relever les tarifs bleus (particuliers et petits professionnels) de 11,4% une fois la réforme votée, puis de 3,5% par an entre 2011 et 2025, si EDF obtenait gain de cause.
M. Proglio estime pourtant ce prix de vente nécessaire en raison des énormes investissements qu'EDF doit réaliser dans le renouvellement et l'extension de la durée de vie de son parc de 58 réacteurs nucléaires.
La CRE plaide elle pour une hausse moindre, de 7,1% puis de 3,1% par an.
Mercredi soir, le ministère de l'Energie a démenti "catégoriquement les rumeurs relatives aux tarifs de l'électricité".
"Le gouvernement est responsable de la détermination des tarifs réglementés et nul autre n'a autorité aujourd’hui pour établir des orientations à ce sujet", a-t-il assuré.
"Aucun élément dans les propositions d’EDF sur la loi Nome n’entraînerait les hausses de tarifs évoquées par la CRE", a de son côté affirmé le groupe d'électricité.
Quant au président de la CRE, Philippe de Ladoucette, il a indiqué à l'AFP qu'il avait "simplement donné aux parlementaires présents des scénarios réalisés par la CRE et sous la responsabilité de la CRE et qui n'engagent en aucune manière EDF".