Les actionnaires de Tokyo Electric Power (Tepco) ont approuvé mercredi lors d'une assemblée générale ordinaire une augmentation de capital grâce à un apport de l'Etat, entérinant une nationalisation de facto de la compagnie gérante de la centrale accidentée de Fukushima.
Alors que des opposants à l'énergie nucléaire protestaient devant le gymnase où se tenait la réunion, les détenteurs de titres Tepco ont donné leur accord à une levée de fonds qui fera du pays le principal actionnaire de la compagnie privée.
Tepco est actuellement dans une situation extrêmement délicate, avec des finances dévastées par les conséquences de la catastrophe atomique de Fukushima, la pire depuis celle de Tchernobyl (Ukraine) en 1986, provoquée par le séisme et le tsunami du 11 mars 2011.
Dans une ambiance houleuse, les dirigeants ont défendu le plan censé sortir Tepco de l'impasse actuelle, via une augmentation de capital de 1.000 milliards de yens (près de 10 milliards d'euros), basée sur l'émission de deux types de nouvelles actions préférentielles à l'intention d'une institution publique ad hoc.
Les autorités japonaises, qui deviendront alors propriétaires des actions d'ici au 25 juillet, seront majoritaires au tour de table de la compagnie avec dans un premier temps 50,11% des droits de vote, tout en ayant la possibilité de monter à 75,84%.
Les actions préférentielles émises seront en outre convertibles en titres ordinaires, ce qui le cas échéant accroîtrait encore le pouvoir de décision de l'Etat dans la compagnie.
Si d'aventure la part détenue par les pouvoirs publics nippons venait à dépasser les deux-tiers, le gouvernement disposerait alors d'une majorité qualifiée lui permettant de modifier la structure de Tepco, par exemple pour scinder ses différentes activités de production et de distribution d'électricité.
L'Etat nippon ne peut en aucun cas laisser s'effondrer la compagnie chargée de l'alimentation électrique de la mégapole de Tokyo et de ses environs, coeur économique et centre névralgique du pays.
Le groupe a déjà reçu des avances substantielles de quelque 16 milliards d'euros pour indemniser des centaines de milliers de particuliers et entreprises victimes des fuites radioactives.
Il doit en outre débloquer des montants colossaux pour faire face aux dommages subis par ses installations, stabiliser le site et, à terme, démanteler au moins quatre des six réacteurs de la centrale.
Ses comptes sont aussi plombés par la montée en flèche de sa facture d'hydrocarbures, carburants que la compagnie doit importer en masse pour faire tourner à plein ses centrales thermiques, afin de compenser l'absence d'énergie nucléaire.
Comme gage de bonne conduite, la compagnie a promis d'économiser plus de 3.300 milliards de yens (près de 33 milliards d'euros) en une décennie, d'oeuvrer dur pour "dédommager les sinistrés, démanteler les réacteurs et assurer un approvisionnement stable en électricité".
Durant l'assemblée de ce mardi, un représentant de la municipalité de Tokyo, actionnaire et cliente de la compagnie, a vigoureusement invité les dirigeant du groupe à se comporter de façon exemplaire.
"La population japonaise et les habitants de Tokyo n'ont plus confiance en tepco", a averti le gouverneur-adjoint de la capitale, Naoki Inose.
Selon les évaluations d'un groupe d'experts mandatés en 2011 par le gouvernement, Tepco aurait besoin de quelque 4.540 milliards de yens (44 milliards d'euros) avant mars 2013 pour les dédommagements, et de plus de mille milliards de yens pour démanteler ensuite les quatre réacteurs condamnés sur les six de Fukushima Daiichi.
Il faudra quarante ans pour y parvenir, trois des réacteurs étant si endommagés qu'une extraction du combustible paraît inenvisageable avant 2022.