La Commission européenne a exigé mercredi de la France des réformes, notamment des retraites et du marché du travail, en échange du délai de deux ans accordé pour ramener son déficit dans les clous européens.
Bénéficiant du même traitement, l'Espagne doit elle aussi aller plus vite concernant sa réforme du marché du travail, entamée en 2012. L'objectif est de faire face à un des chômages les plus élevés d'Europe, qui touche plus d'un jeune sur deux.
Dans le cadre des recommandations économiques de la Commission aux pays de l'UE, celles pour la France étaient particulièrement attendues, alors que la deuxième économie de la zone euro est en récession avec des déficits importants et voit son chômage exploser.
Bruxelles a donc demandé à Paris de prendre des mesures dès cette année pour réformer son système de retraites et le ramener à l'équilibre "pour 2020 au plus tard".
L'exécutif européen recommande à Paris "d'adapter les règles d'indexation, les âges minimum et de taux plein, la période de contribution et les régimes spéciaux, mais en évitant d'augmenter les contributions des employeurs".
Le gouvernement français veut proposer à l'automne une nouvelle réforme des retraites, qui prévoit un allongement de la durée de cotisation, mais pas de nouveau recul de l'âge légal.
"La Commission n'a pas à nous dicter ce que nous avons à faire", a répliqué le président français François Hollande. "Elle a simplement à dire que la France doit rétablir ses comptes publics", a-t-il affirmé en marge d'un déplacement à Rodez (sud de la France)
Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a lui promis des réformes que la France fera à sa "manière" tandis que le ministre des Finances, Pierre Moscovici, moins offensif, a répété "son engagement déterminé à poursuivre sa stratégie de sérieux budgétaire, au bon rythme".
La Commission a également renouvelé sa demande de réforme du marché du travail et d'ouverture de certaines professions en France, comme les notaires ou les taxis. Elle souhaite aussi que Paris supprime les tarifs réglementés sur le gaz et l'électricité et ouvre le secteur du transport ferroviaire domestique des passagers.
Dans un autre domaine, elle demande à Paris de poursuivre ses efforts de simplification de la fiscalité: élargir la base de l'impôt sur le revenu, ramener les taux de TVA proches de la moyenne européenne, transférer une partie de la fiscalité sur le travail vers l'environnement et la consommation.
"C'est un message d'exigence", a estimé le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, lors d'une conférence de presse.
La Commission a aussi fait le point sur l'assainissement des finances publiques des Etats-membres. Outre la France et l'Espagne, elle a accordé deux ans de plus à la Pologne et à la Slovénie, et un an aux Pays-Bas et au Portugal, pour ramener leur déficit public sous le seuil des 3%, confirmant ainsi qu'elle voulait desserrer la bride de l'austérité.
Mais elle a donné des calendriers précis. Pour la France: 3,6% du PIB en 2014 et 2,8% en 2015, après 3,9% cette année. Pour l'Espagne 5,8% en 2014, 4,2% en 2015 et 2,8% en 2016, après 6,5% cette année.
Actuellement, 20 pays sur 27 dans l'UE sont concernés par la procédure d'infraction pour déficit excessif. La Commission a proposé que cinq d'entre eux, l'Italie, la Lettonie, la Hongrie, la Lituanie et la Roumanie sortent de cette procédure.
Selon les prévisions de la Commission, le déficit italien doit être à 2,9% cette année et 2,5% en 2014, bien en-deçà de la barre des 3%. Mais "la dette publique reste très importante en Italie, c'est une très lourde charge. Voilà pourquoi nous ne pouvons pas dire que l'Italie peut relâcher ses efforts", a mis en garde M. Barroso.
La Commission veut en revanche que la Belgique soit mise en demeure de corriger son déficit, constatant que ce pays "n'a engagé aucune action suivie d'effet pour mettre un terme à sa situation de déficit excessif".
Les recommandations seront discutées lors du prochain sommet européen fin juin, avant d'être approuvées par les ministres des Finances des 27.