Le président de la Commission européenne a proposé mardi la création d'emprunts obligataires européens pour financer de grands projets, afin de soutenir la croissance en Europe, une idée qui toutefois ne fait pas l'unanimité au sein de l'UE.
"Un euro dépensé au niveau européen rapporte plus qu'un euro dépensé au niveau national", a déclaré José Manuel Barroso dans un discours devant le Parlement européen à Strasbourg.
"C'est la raison pour laquelle nous devrions examiner de nouvelles sources de financement pour des projets d'infrastructure très importants. Par exemple, je vais proposer la création d'emprunts obligataires pour des projets, en coopération avec la Banque européenne d'investissement (BEI)", a-t-il ajouté.
M. Barroso n'a pas donné de détails. Mais, selon un membre de son entourage, l'idée serait que Bruxelles puisse faire appel à la BEI pour lever des fonds afin d'aider à financer des grands projets, compte tenu des limites du budget de l'UE et du succès mitigé des partenariats industriels public-privé de l'UE à ce jour, pour le système européen de localisation par satellite Galileo ou le réacteur nucléaire expérimental Iter.
En tant que tel, l'exécutif européen n'est pas autorisé par les traités à emprunter lui-même de l'argent sur les marchés.
L'idée des emprunts obligataires européens (eurobonds ou euro-obligations), au niveau de toute l'UE ou de la seule zone euro, n'est pas nouvelle et a été rejetée jusqu'ici par de nombreux pays comme l'Allemagne, peu encline à partager les risques d'un emprunt avec d'autres Etats et à leur faire profiter de ses taux d'intérêt très avantageux.
Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a confirmé les fortes réticences de son pays à l'égard de tout emprunt obligataire européen. "Il s'agit d'idées qui, une fois qu'on s'éloigne de quelques kilomètres de Bruxelles, apparaissent un peu irréalistes", a-t-il dit à Bruxelles.
Le débat sur les emprunts obligataires européens a été relancé avec la crise économique et les difficultés de la Grèce en raison du dérapage des déficits nationaux et des conditions plus difficiles auxquelles sont confrontés certains gouvernements pour emprunter sur les marchés.
"L'Europe est à un moment de vérité, nous devons montrer que l'Europe est davantage que 27 différentes solutions nationales. Soit nous nageons ensemble, soit nous coulons chacun de notre côté", a averti M. Barroso.
Sur le plan diplomatique, il a aussi exhorté l'Europe "à jouer un rôle correspondant à son poids économique". "Si nous n'agissons pas ensemble, l'Europe ne constituera pas une force dans le monde et les autres iront de l'avant sans nous", a-t-il dit.
M. Barroso est intervenu devant le Parlement pour son tout premier "discours sur l'état de l'Union" européenne, une création du traité de Lisbonne censée donner une plus grande visibilité à l'UE, sur le modèle de celui que prononce chaque année le président des Etats-Unis pour présenter son programme au Congrès.
Le Portugais, qui a entamé cette année un deuxième mandat de cinq ans, a toutefois dû essuyer des critiques acerbes de plusieurs groupes politiques qui lui reprochent d'être resté trop inactif face à la crise et de manquer de courage face aux grands Etats de l'UE qui donnent le ton aujourd'hui sur les affaires européennes.
"Vous êtes le président aux abonnés absents d'une Europe qui a besoin d'un président", lui a lancé le chef de file des Verts, Daniel Cohn-bendit.