Le président chypriote Nicos Anastasiades a assuré lundi que l'enquête sur tous les scandales liés à la tourmente financière dans laquelle l'île est plongée n'épargnerait personne, ni même sa propre famille.
Les médias chypriotes bruissent ces derniers jours de rumeurs sur des transferts providentiels effectués par des proches de M. Anastasiades, de son prédécesseur communiste Demetris Christofias, dont le mandat s'est achevé en février, ou d'autres personnalités politiques.
Le gouvernement a nommé la semaine dernière une commission d'enquête composée de trois anciens juges de la Cour suprême chargés de déterminer les responsabilités -y compris pénales- dans la crise et de relever d'éventuels délits d'initiés ou favoritismes.
"Je veux insister sur le fait que lors de la cérémonie de prestation de serment demain (mardi) pour ces trois juges, ils vont recevoir un mandat pour enquêter sur tout ce qui peut m'être lié, y compris mes proches par alliance", a déclaré M. Anastasiades.
Les accusations dans la presse évoquent d'importantes sommes transférées depuis les deux principales banques vers l'étranger juste avant le début de la crise.
La commission doit aussi enquêter sur une liste remise par la presse grecque de personnalités politiques et de leurs proches auxquels les banques ont effacé des prêts pour un total se chiffrant en millions d'euros au cours des cinq dernières années.
Au bord de la faillite, Chypre a obtenu le 25 mars un plan de sauvetage international de 10 milliards d'euros, au prix d'une restructuration drastique de son système bancaire qui va voir les gros clients de Laïki et Bank of Cyprus, les deux principales banques du pays, perdre une grande partie de leurs avoirs.
Ces pertes massives, qui touchent fortement les entreprises et risquent d'avoir des conséquences dramatiques sur l'économie, alimentent un profond ressentiment envers quiconque aurait pu bénéficier d'un quelconque privilège.
Les comptes dépassant 100.000 euros sont gelés à la Bank of Cyprus et à la Laïki. La seconde doit être liquidée, et les gros comptes de la première doivent subir une ponction qui pourrait aller jusqu'à 60%.
Les petits comptes de la Laïki ainsi que tous les crédits vont être transférés à la Bank of Cyprus où ils fonctionneront normalement. Les sommes dépassant les 100.000 euros, une fois minorées par les éventuels crédits, resteront dans la "bad bank" appelée à disparaître.
Cependant, l'intégralité des dépôts à la Laïki "des institutions financières, du gouvernement, des municipalités, des conseils municipaux et d'autres collectivités, des compagnies d'assurance, des organisations caritatives, des écoles et des institutions éducatives" seront transférés à la Bank of Cyprus, où ils ne subiront aucune ponction.
A la Bank of Cyprus, les détenteurs de dépôts de plus de 100.000 euros, minorés des éventuels crédits en cours, verront au moins 37,5% de leurs fonds transformés en actions.
En outre, 22,5% des sommes dépassant le plafond seront immobilisées jusqu'à ce que les autorités déterminent si elles en ont besoin pour remplir les conditions du plan de sauvetage de la troïka (UE, BCE et FMI). Les derniers 40%, ainsi que ce qui restera des 22,5%, resteront bloqués avant de revenir à leur dépositaire.
Alors que plusieurs responsables avaient jusque-là parlé d'un gel de six mois, qui pourrait être fatal à de nombreuses entreprises, le porte-parole du gouvernement Christos Stylianides a indiqué lundi que l'objectif des autorités était de "libérer les 40% (restants) demain (mardi) matin afin de revenir à un niveau normal d'activité économique".
"Nous voulons convaincre tous ceux liés à ce gel (la troïka, ndlr) que ce gel ne peut continuer sur les 40%", a-t-il ajouté.