Les Bourses électroniques BATS Global Markets et Direct Edge, dont les technologies se prêtent particulièrement bien au courtage à haute fréquence, ont annoncé lundi leur fusion, qui devrait donner naissance à la deuxième Bourse des Etats-Unis.
Le volume d'échange sur le marché vedette de Wall Street, le NYSE, atteint actuellement 23% du total des actions échangées par jour aux Etats-Unis, contre 18% pour le Nasdaq, la Bourse électronique de Time Square. A eux deux, Direct Edge et BATS affichent 20,6% du marché.
La transaction, dont les termes financiers n'ont pas été dévoilés, devrait être finalisée au premier semestre 2014, sous couvert de l'obtention des autorisations administratives de rigueur.
Le directeur général de BATS Joe Ratterman va garder le même titre dans la nouvelle entité et celui de Direct Edge, William O’Brien, sera l'un des membres exécutifs du conseil d'administration.
"Cet accord marque une date importante pour les marchés d'actions car elle va combiner deux organisations qui ont été innovantes pour créer une place financière plus compétitive pour tous les investisseurs", a commenté M. Ratterman, cité dans le communiqué.
BATS avait tenté de s'introduire en Bourse en mars 2012, mais l'opération a tourné au fiasco après qu'un problème informatique a forcé la Bourse d'échanges à interrompre la cotation de ses propres actions quasiment dès leur lancement.
L'an dernier, Direct Edge avait parallèlement mené des discussions pour se vendre à l'opérateur boursier canadien TMX Group, mais elles ont achoppé quand celui-ci a été racheté par des investisseurs canadiens.
Direct Edge est né en 1998 sous le nom d'Attain. La plateforme a changé de mains plusieurs fois et a été rebaptisée en 2005. BATS a été fondé en 2005 par la société de courtage à haute fréquence Tradebot Systems.
Pour Gregori Volokhine, directeur de la stratégie de Meeschaert New York, cette fusion "arrive un peu par obligation": après son introduction boursière ratée, BATS ne peut selon lui survivre seule, et la concurrence entre places boursières aux Etats-Unis est de plus en plus forte.
"Si on veut acheter une action Apple ou Facebook, il y a environ 60 places boursières en ce moment aux Etats-Unis entre les bourses publiques et les +dark pools+", ajoute-t-il.
Les "dark pools" sont des systèmes boursiers exploités par un prestataire de services d'investissement ou un opérateur de marché, une banque par exemple, permettant de contourner certaines réglementations et, pour les investisseurs, de rester anonymes.
Jeu de "Pac-Man"
"C'est un environnement difficile et nos clients comptent sur les places boursières pour les aider à y naviguer", a déclaré William O'Brien sur la chaîne CNBC.
"Il y a une baisse des volumes" à cause de la dilution des échanges entre les grandes places boursières et les "dark pools", et "une forte pression sur les prix d'exécution et sur les commissions et donc les marges. Il faut donc une taille critique, on l'a vu avec ce qu'a fait Euronext", poursuit M. Volokhine.
Le rachat de NYSE Euronext par son concurrent ICE a été annoncé en décembre 2012.
Pour Gregori Volokhine, c'est grâce à ce "jeu de Pac-Man" que le NYSE se maintient en tête des volumes d'actions échangés aux Etats-Unis. Le mariage de BATS et Direct Edge devrait donc accélérer la consolidation du secteur et surtout pousser le Nasdaq à trouver rapidement un partenaire.
"Etre le numéro trois du marché n'est pas vraiment une bonne situation, surtout après ce qui s'est passé", remarque-t-il.
La semaine dernière, les échanges ont été suspendus pour la première fois pendant trois heures de suite en pleine séance sur le Nasdaq, à cause d'un problème informatique qui empêchait une bonne communication avec les autres places boursières.
"Chaque place marche très bien en soit, mais elles doivent toutes être connectées. Sans diffusion instantanée de cours il n'y a plus de marché", remarque M. Volokhine, qui y voit là la principale vulnérabilité de ces marchés disséminés.