Le groupe informatique Apple comparaissait lundi à New York devant la justice, accusé par le gouvernement américain de s'être entendu avec cinq maisons d'édition aux Etats-Unis pour relever les prix des livres électroniques, au détriment des consommateurs.
Apple a lancé sa tablette informatique iPad en 2010 et "ce jour là les prix de la plupart des livres électroniques ont monté de plus de 15%", a résumé graphique à l'appui un des avocats du département de la Justice, Lawrence Buterman, au premier jour du procès qui a débuté vers 13H30 GMT.
C'était "le résultat d'un schéma coordonné organisé par Apple", qui a "sciemment et intentionnellement aidé" les éditeurs dans leurs efforts pour relever les prix, a-t-il ajouté, évoquant "un simple cas d'entente sur les prix".
Apple est le seul à répondre devant la juge Denise Cote, les cinq éditeurs impliqués ayant préféré passer un accord amiable avec les autorités et ne devant donc être entendus que comme témoins. Il s'agissait des sociétés française Hachette, américaines HarperCollins (groupe News Corp) et Simon and Schuster (CBS), britannique Penguin (Pearson) et d'une filiale de l'allemand Bertelsmann, Macmillan.
"Le gouvernement a tort", a répliqué Orin Snyder, un avocat du groupe informatique.
"Apple n'a rien fait de mal, il ne s'est pas entendu, individuellement ou collectivement, avec les éditeurs pour augmenter les prix", a-t-il poursuivi en évoquant des actions "légales, légitimes" de la part du groupe et des preuves "ambiguës" avancées par le gouvernement.
"Apple devrait être applaudi, pas condamné" pour l'effet que son arrivée a eu sur un marché "manquant d'innovation, manquant de concurrence", a encore jugé M. Snyder.
Le groupe à la pomme fait valoir qu'il a contribué à augmenter la concurrence sur un marché largement dominé à l'époque par le distributeur en ligne Amazon et sa liseuse Kindle, lancée en 2007.
D'après le gouvernement, les éditeurs jugeaient trop bas le prix de 9,99 dollars fixé par Amazon pour un grand nombre de titres, et l'entente avec Apple a permis de les amener à des niveaux situés entre 12,99 et 14,99 dollars.
L'enjeu selon M. Buterman a été d'obtenir "des changements pour l'ensemble du secteur des livres électroniques".
Les détaillants comme Amazon, qui payaient jusqu'alors un prix de gros aux éditeurs et choisissaient librement celui de revente au détail, se sont vu imposer un nouveau modèle: en coordination avec Apple, les éditeurs ont tous en même temps décidé de fixer les prix eux-mêmes et de reverser une commission aux revendeurs --30% dans le cas d'Apple.
L'un des contentieux centraux entre l'accusation et la défense est une clause incluse dans tous les contrats signés par Apple avec les éditeurs et lui permettant d'aligner les prix des titres dans sa boutiques en ligne sur ceux éventuellement moins élevés proposés par un concurrent.
Pour l'accusation, c'était un moyen d'obliger les éditeurs à imposer le modèle de distribution décidé avec Apple à tous les autres détaillants, dont Amazon. La défense assure qu'Apple voulait ainsi s'assurer d'avoir des prix "bas et compétitifs".
D'après le gouvernement, l'entente a été orchestrée du côté d'Apple par Eddy Cue, un dirigeant du groupe qui était chargé des contenus, avec des échanges par courriel et téléphone, mais aussi des rencontres personnelles à New York avec les patrons des éditeurs. Il rendait toutefois des comptes très régulièrement au patron de l'époque du groupe à la pomme, Steve Jobs, aujourd'hui décédé.
M. Cue sera appelé à la barre le 13 juin. Le successeur de M. Jobs, Tim Cook, ne devrait pas venir témoigner au procès. Les audiences doivent s'étaler au total sur trois semaines, avec des plaidoiries finales le 20 juin.