Le gouvernement espagnol prépare une loi qui permettra à la Banque d'Espagne de mettre sous tutelle des banques insuffisamment solvables, ayant besoin d'une aide publique, et de les mettre en vente dès que leur viabilité apparaît douteuse, selon le projet de loi consulté jeudi par l'AFP.
Il permettrait à la banque centrale de s'emparer d'une banque jugée "non-viable" ou dont il est "prévisible qu'elle le soit dans un avenir proche", indique le document.
La zone euro a accordé en juin une ligne de crédit à l'Espagne d'un maximum de 100 milliards d'euros pour renflouer ses banques, fragilisées par leur exposition au secteur immobilier sinistré.
En échange, le pays doit engager une réforme de son secteur financier afin notamment d'en consolider la supervision. Le projet de loi répond à ces consignes.
S'il est adopté, il suffira que le régulateur estime qu'il est "prévisible" qu'une banque ne puisse pas renforcer son bilan à court terme, soit "par ses propres moyens, en faisant appel aux marchés", soit grâce à un soutien public, pour qu'elle soit jugée non-viable.
La Banque d'Espagne lui exigera alors un plan de redressement, qui, s'il est jugé convaincant, pourra lui éviter de faire appel à une aide publique.
Dans le cas contraire, le fonds public d'aide au secteur financier (Frob) entrera en action.
Créé en 2009, ce fonds jouira d'un pouvoir renforcé, selon le projet, qui lui permettra de mettre rapidement sous tutelle les banques jugées trop fragiles.
Le Frob devra alors "élaborer un plan" d'assainissement sous deux mois, qui décidera soit de restructurer la banque, soit de la vendre.
Le Frob pourra vendre "sans avoir besoin d'obtenir le consentement des actionnaires", précise le projet.
Ces derniers, et autres investisseurs, risquent ainsi de se retrouver en première ligne de la débâcle des banques espagnoles les plus fragiles.
"Les actionnaires, détenteurs de participations ou associés, selon les cas, des banques seront les premiers à supporter les pertes", précise le document.
Les détenteurs de dette subordonnée des banques devront aussi assumer, le cas échéant, "les pertes occasionnées par la restructuration", après les actionnaires.
Mettre les actionnaires en première ligne en cas de difficulté d'une banque répond aux conditions fixées par Bruxelles en échange de l'aide.
Les banques jugées systémiques, car elles représentent une part trop importante du marché, pourraient cependant échapper à la liquidation forcée, précise le projet, pour ainsi éviter "des effet graves et dommageables pour la stabilité de l'ensemble du système financier".
Cette exception devrait ainsi s'appliquer à Bankia, la quatrième banque espagnole par les actifs, nationalisée, dont la demande d'un sauvetage historique en mai a précipité l'aide européenne pour tout le secteur.
Dans le cas où le Frob décide de liquider une banque, il pourra vendre directement tout ou partie de ses actifs, ou choisir de les transférer vers une "banque relais", chargée de trouver un acheteur sous cinq ans.
Les actifs toxiques seront quant à eux transférés vers une structure de défaisance, ou "bad bank".