Placé devant un accord "à prendre ou à laisser", le gouvernement suisse a accepté mercredi les exigences de Washington pour régler le dossier des avoirs américains non déclarés déposés en Suisse afin de préserver l'accès au marché américain pour les banques helvétiques.
Il y avait urgence à conclure, a indiqué en substance mercredi la ministre suisse des finances, Eveline Widmer-Schlumpf, en présentant l'accord à la presse, car les Etats-Unis n'étaient pas disposés à attendre encore davantage la régularisation des fonds américains placés dans les banques suisses.
Actuellement, la justice américaine a engagé des poursuites contre une douzaine de banques, et Berne craignait que ces actions judiciaires ne fassent tâche d'huile et ne s'étendent à encore davantage de banques suisses.
Aucun détail, notamment financier, sur le montant des amendes encourues par les banques suisses pour avoir accepté et géré des fonds américains non déclarés pendant des années n'a été révélé mercredi, en raison d'une clause de confidentialité adoptée par Berne et Washington.
La presse avait avancé cette semaine une estimation d'un montant record de 10 milliards de francs suisses (8 milliards d'euros) d'amende à verser au fisc américain.
L'accord et ses dispositions financières sera dévoilé une fois que la loi qui l'inclut sera adoptée et entrera en vigueur, soit au le 1er juillet.
Le projet de loi ad-hoc sera discuté devant le Parlement suisse ces prochains jours. Il devra donner son feu vert sur cette base légale, sans connaître le détail des exigences américaines.
A plusieurs reprises mercredi, Mme Eveline Widmer-Schlumpf a indiqué qu'il s'agissait "d'un programme unilatéral américain, qui n'était susceptible d'aucune discussion", un accord à prendre ou à laisser.
La seule indication donnée mercredi par la ministre est que la facture risque d'être salée pour les banques suisses qui ont fait beaucoup d'affaires avec les clients américains non déclarés.
Pour elle, la Suisse n'aura cependant "rien à payer", et ce sont les banques concernées qui devront communiquer elles-mêmes sur leurs amendes.
Concrètement, l'accord donne un délai d'un an aux banques ayant des clients américains non déclarés d'accepter ou refuser les conditions américaines.
Si elles acceptent ces conditions, elles devront se plier à toutes leurs exigences, sans possibilités de négociations.
Pour Berne, l'accord "permettra aux banques, en collaboration avec le ministère américain de la justice, de négocier un règlement définitif du passé".
"La solution retenue permet de rétablir la paix juridique", indique encore Berne.
De son côté, l'Association patronale des banques en Suisse a indiqué que la solution "devrait apporter la sécurité juridique aux banques et à leurs clients".
Premier parti suisse, l'UDC (Union démocratique du centre, droite populiste) a réagi avec indignation mercredi à cette annonce, dénonçant une "capitulation" de Berne devant les exigences américaines.
"Les Américains dictent toutes les conditions", ajoute l'UDC, qui s'insurge contre ce projet de loi qui va être soumis au Parlement, sans que l'on en connaisse les principales dispositions pour les banques suisses.
Les Etats-Unis, ajoute l'UDC, "mènent une guerre économique contre la Suisse, qui aurait dû depuis longtemps repousser les chantages d'une administration américaine de gauche". Il est inacceptable, ajoute l'UDC, que l'Etat de droit suisse "soit sacrifié" et il est inacceptable "qu'avec la bénédiction du Parlement, les employés de banques et les chargés d'affaires des banques soient livrés à l'abattoir, alors qu'ils n'ont fait que remplir leurs obligations et respecté leur contrat de travail".
Un autre volet de l'accord, outre l'amende, concerne en effet la transmission à la justice américaine, des noms des employés de banques et des chargés d'affaires ayant eu affaire à ces clients américains.
C'est justement pour venir en aide à ces employés, qui pourraient être confrontés à de graves ennuis judiciaires aux Etats-Unis, que l'Association des banques en Suisse a décidé mercredi de créer un fonds spécial de soutien doté de 2,5 millions de francs suisses (2 millions d'euros).