La crise de la dette en Europe commence à se faire sentir en Asie, en freinant les exportations des pays de cette région du globe, qui va devoir trouver d'autres moteurs de croissance tels que la consommation intérieure, soulignent organismes internationaux et analystes.
Les six principales économies d'Asie du sud-est (Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande et Vietnam) afficheront en moyenne une croissance de 5% en 2011 et de 5,6% de 2012 à 2016, soit deux points de moins qu'en 2010, prévoit l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans son rapport sur cette région.
Les analystes de la banque américaine Morgan Stanley ont révisé à la baisse, pour la deuxième fois en trois mois, la croissance pour l'Asie --hors Japon--. Ils tablent désormais sur une hausse du Produit intérieur brut (PIB) de cette zone de 6,9% en 2012, contre 7,3% prévu auparavant, selon un rapport publié lundi.
Les pays de la région les plus dépendants des exportations (Hong Kong, Singapour, Taïwan, Malaisie, Corée du Sud et Thaïlande), seront logiquement les plus exposés à une aggravation des conditions économiques mondiales causée par la crise en Europe et la mollesse de la reprise aux Etats-Unis, a ajouté Morgan Stanley.
La Banque de Corée a ainsi noté mardi que les exportations du pays avaient baissé en octobre, comparé à un an plus tôt.
Même les pays disposant d'un vaste marché intérieur (Chine, Indonésie, Inde) "ne pourront pas échapper" aux conséquences de cet environnement extérieur dégradé, estime Morgan Stanley.
Lundi, l'OCDE a averti que la zone euro semblait être entrée en "légère récession" en raison de la crise de la dette qui, en cas d'aggravation, pourrait avoir des conséquences "dévastatrices" sur l'économie mondiale.
La Banque mondiale a elle aussi souligné que la croissance des pays d'émergents d'Asie de l'est souffrait de la crise européenne. Mais la Chine les préserve d'un coup de frein brutal, indiquait-elle dans son rapport semestriel régional publié la semaine dernière.
"Le ralentissement de la croissance en Europe dans le sillage de l'austérité financière et les recapitalisations bancaires affectent l'Asie orientale", constate la Banque mondiale.
"Mais d'importantes réserves (de devises étrangères) et des comptes courants excédentaires préservent la plupart des pays de la région" d'une forte correction, note-t-elle.
Faute de débouchés en Europe, ces pays se tournent vers la Chine et son immense marché de 1,3 milliard d'habitants, qui devrait rapidement ravir à l'Union européenne (UE) la place de deuxième importateur au monde, derrière les Etats-Unis.
Les pays émergents d'Asie de l'est comptent désormais pour 18% des importations chinoises de biens de consommation, selon la Banque mondiale.
Elle souligne également que ces pays doivent renforcer leur indépendance économique en se réformant et en investissant afin de "s'assurer une croissance plus forte et tirée par la consommation intérieure".
Ils doivent aussi faire un effort important dans l'éducation et la formation s'ils veulent "améliorer la productivité et orienter leur économie vers une production à plus haute valeur ajoutée".
"Un nouveau type de croissance est nécessaire en Asie du sud-est", a renchéri mardi Mario Pezzini, un responsable de l'OCDE.
"Le bon côté dans cette montée des incertitudes (sur l'économie mondiale), c'est qu'elle offre l'occasion de réinventer la croissance", a-t-il déclaré. "Fortement dépendantes de la demande extérieure, ces économies d'Asie du sud-est vont voir +les moteurs intérieurs+ jouer un rôle plus important".
Ces "moteurs intérieurs" comprennent les investissements dans les infrastructures et la consommation des ménages, encouragée par l'élargissement d'une classe moyenne et les réformes de politiques sociales, selon le rapport.