La Banque centrale européenne (BCE) a maintenu sans surprise jeudi son principal taux directeur à 1,50%, alors que la crise de la dette s'enlise et que la croissance économique en zone euro semble en berne.
L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) s'est montré alarmiste jeudi, n'excluant pas une nouvelle récession dans les pays riches. Même l'Allemagne, locomotive économique de la zone euro, ne serait pas épargnée, ses économistes lui prédisant un recul de 0,35% du PIB au quatrième trimestre sur le trimestre précédent.
Les mauvais indicateurs pèsent aussi sur le moral des investisseurs et des ménages, tandis que les spéculations sur une faillite de la Grèce n'en finissent pas de ressurgir et de semer la panique sur les places boursières. D'autant que les responsables politiques européens ont du mal à s'exprimer d'une seule voix.
Dans la matinée, la Commission européenne a dû prendre la parole pour exclure une sortie forcée de la Grèce de la zone euro.
Le ministre néerlandais des Finances avait semé le trouble en affirmant que les pays qui n'arrivent ou ne souhaitent pas à l'avenir respecter les exigences du Pacte de stabilité doivent abandonner d'eux-mêmes la monnaie unique.
Dans ce contexte, les économistes ne voient pas la BCE poursuivre sur le chemin du resserrement monétaire entamé en avril. Au contraire, certains attendent désormais que la BCE baisse ses taux si la situation se détériore vraiment. Les Bourses européennes espéraient peut-être un tel mouvement dès jeudi: la plupart ont chuté après l'annonce de la BCE.
Alors que Holger Schmieding, chef économiste chez Berenberg Bank, s'attend à ce que la BCE maintienne ses taux "jusque mi-2012", Jennifer McKeown de Capital Economics pense elle qu'elle sera peut-être contrainte de les baisser dès décembre. L'Italien Mario Draghi aura alors succédé au Français Trichet, dont le mandat de huit ans s'achève le 31 octobre.
Un scénario d'autant plus plausible selon Mme McKeown que la BCE est actuellement assez isolée dans sa stratégie de resserrement monétaire.
La Réserve fédérale américaine (Fed) a en effet annoncé en août qu'elle était prête à maintenir ses taux proches de zéro jusque mi-2013, tandis que la Banque d'Angleterre ne prévoit pas de relever les siens avant la fin 2012.
L'éventualité d'une baisse prochaine des taux est toutefois exclue par d'autres analystes, notamment pour une question de crédibilité.
Carsten Brzeski, d'ING, souligne ainsi qu'une baisse en fin d'année "ferait passer les hausses d'avril et juillet pour des erreurs".
Le président de la BCE Jean-Claude Trichet devrait une nouvelle fois être interrogé sur les rachats d'obligations publiques destinés à soulager les pays les plus fragiles de la zone, lors de la conférence mensuelle à partir de 12H30 GMT au siège de l'institution à Francfort (ouest).
Après avoir mis en sommeil ce programme adopté à contrecoeur en mai 2010, la BCE l'a réenclenché début août, devant la menace de contagion de la crise de la dette à à l'Italie et l'Espagne, 3ème et 4ème économies de la zone euro. Avec succès jusqu'à présent, puisque les taux d'emprunt italiens et espagnols se sont détendus.
Elle attend toutefois que le Fonds européen de stabilité financière (FESF), dont les prérogatives ont été élargies le 21 juillet, la relaye le plus vite possible, comme promis par les responsables politiques européens.
Mais la volonté affichée cette semaine de la Slovaquie de retarder le vote jusqu'à décembre commence à susciter des inquiétudes.
L'aval mercredi de la Cour constitutionnelle allemande aux aides accordées par Berlin à ses partenaires ainsi qu'à la création du FESF a en revanche rassuré.