La facture mondiale des importations alimentaires "pourrait passer le cap des mille milliards de dollars en 2010", ce qui affectera d'abord les pays pauvres, selon la FAO, qui appelle la communauté internationale à "se préparer à de nouveaux chocs".
"La production céréale mondiale sera de 2% inférieure" à celle de l'année précédente, "même si elle reste la troisième meilleure" enregistrée, a indiqué mercredi devant la presse à Rome Hafez Ghanem, vice-directeur de l'Organisation de l'ONU pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO).
Cette baisse de la production "a naturellement un impact sur les prix", a-t-il ajouté, en présentant le rapport "Perspectives de l'alimentation".
Selon la FAO, "la facture des importations alimentaires devrait s'alourdir de 11% en 2010 pour les pays les plus pauvres et de 20% pour les pays à faible revenu et à déficit vivrier".
"La facture alimentaire mondiale a été de 893 milliards de dollars en 2009, cette année nous nous approchons des 1.000 milliards tandis qu'elle a été de 1.030 milliards lors de la crise" en 2007/08, a précisé Adam Prakash, expert de la FAO.
Cependant, pour les spécialistes de la FAO, la situation actuelle est bien différente de celle qui a entraîné la crise alimentaire d'il y a deux ans.
Contrairement à 2007 et 2008, "nous avons débuté l'année 2010 avec des stocks élevés", a expliqué M. Ghanem. "Nous pensons que les stocks vont être réduits au cours de l'année mais, comme les prix des produits agricoles sont élevés, nous pensons qu'ils vont encourager une meilleure production l'année prochaine. C'est ce qui s'est produit dans le passé", a-t-il ajouté.
"Le marché est caractérisé par un degré d'incertitude élevé", a déclaré l'expert pour les céréales Abdolreza Abbassian.
"Il n'y a pas de crise pour le moment", a-t-il souligné, sans l'exclure dans les années à venir. "Des prix alimentaires élevés ne signifient pas automatiquement une crise alimentaire, car la production peut être bonne dans les pays les plus pauvres", a-t-il précisé.
En 2008, les cours des céréales avaient atteint des records historiques, provoquant une crise alimentaire et des émeutes dans de nombreux pays africains, mais aussi en Haïti et aux Philippines.
Selon M. Abbassian, "il n'y a pas de doute que les activités spéculatives (en bourse, ndlr) ont introduit une grande instabilité et volatilité sur le marché" des céréales, même si la spéculation n'est pas la seule cause de la hausse des prix.
"Tout a commencé avec de mauvaises conditions météo, le résultat a été aggravé par des décisions politiques (erronées, ndlr) des gouvernements et les marchés ont réagi", a résumé M. Ghanem.
"Face à la pression exercée sur les prix mondiaux de la plupart des produits de base qui ne montre aucun signe d'allègement, la communauté internationale doit rester vigilante et se préparer à de nouveaux chocs de l'offre en 2011", affirme la FAO.
Contrairement aux prévisions de juin qui envisageaient une progression de 1,2%, la production céréalière mondiale devrait désormais reculer de 2%, du fait de déficits inattendus de l'offre dus à des conditions météorologiques néfastes, comme la sécheresse et les incendies en Russie ou les inondations au Pakistan.
"Compte tenu des prévisions de réduction des stocks mondiaux, les récoltes de l'an prochain seront déterminantes pour la stabilité des marchés internationaux", conclut la FAO.