PARIS (Reuters) - Alain Juppé s'est affiché mercredi avec François Fillon à quatre jours du premier tour de la présidentielle, un soutien a minima censé remobiliser les électeurs de centre-droit tentés par le favori des sondages, Emmanuel Macron.
Déchirée et sonnée par la tourmente judiciaire qui a entravé la campagne de son candidat, la droite s'efforce de faire bloc à l'approche d'un premier tour d'une incertitude inédite qui nourrit les craintes d'une élimination.
Mardi, c'est Nicolas Sarkozy qui a invité dans une vidéo sur Facebook (NASDAQ:FB) et Twitter à voter, "sans états d'âme", pour François Fillon et appelé la droite à ne pas céder à la "maladie" de la division.
"On joue l'avenir de la France : il y a un message de rassemblement, c'est plutôt bien pour cette fin de campagne. Cette élection, c'est du jamais vu, ça doit provoquer une réaction de mobilisation", résumait la députée (Les Républicains) Nathalie Kosciusko-Morizet avant l'arrivée de François Fillon et Alain Juppé dans les locaux parisiens de Deezer, premier site français d'écoute de musique en ligne.
Les deux finalistes de la primaire ne s'étaient pas retrouvés en public depuis un déplacement à Mérignac le 25 janvier, jour de la révélation des emplois présumés fictifs de l'épouse de François Fillon par Le Canard enchaîné.
Une visite à l'école 42 de Xavier Niel, à Paris, avait été initialement prévue par l'équipe du candidat mais elle a été annulée "pour des raisons de sécurité", a affirmé mercredi à des journalistes le vice-président d' Iliad (PA:ILD), qui a investi dans Deezer et était présent dans ses locaux.
La direction de l'école de codage informatique a démenti que l'annulation ait été motivée par le projet d'élèves de manifester leur hostilité à François Fillon, via notamment le détournement de fonds d'écran d'ordinateurs qui auraient affiché "Rends l'argent", comme l'ont rapporté plusieurs médias.
Mercredi pourtant, dans les bureaux de Deezer, des "Rends l'argent" étaient visibles sur des ordinateurs ou écrans de télévision, comme le montrent plusieurs clichés sur Twitter.
"RAGOTS"
François Fillon et Alain Juppé n'en ont rien vu, qui se sont serré la main, sourire contraint pour le maire de Bordeaux, devant caméramen et photographes.
Un peu plus d'une heure de visite et de discussions avec des responsables de Deezer brouillée par des questions répétées à Alain Juppé sur des propos que lui prête Le Canard enchaîné à propos de Sens Commun, émanation politique de La Manif pour tous qui occupe une place notable dans l'équipe de François Fillon.
Agacé, le maire de Bordeaux, plébiscité au plus fort de la crise pour remplacer François Fillon, a lâché : "Si on répondait à tous les ragots qui circulent dans les médias, on ne serait pas couché!"
Selon l'hebdomadaire satirique, le héraut de l'aile modérée des Républicains a déclaré qu'il refuserait de soutenir un gouvernement "dont la ligne serait dictée par Sens commun". François Fillon a précisé dimanche sur Radio J qu'il n'excluait pas, s'il était élu, d'ouvrir son gouvernement aux conservateurs de ce mouvement.
Virginie Calmels, première adjointe au maire de Bordeaux, est venue au secours de ce dernier en assurant qu'il n'avait jamais tenu ce genre de propos. "La droite, c'est une famille plurielle qui va de Sens commun au centre-droit", a-t-elle dit à la presse.
"Aujourd'hui, ce n'est pas une réconciliation, ils n'en ont pas besoin", a-t-elle assuré alors que les tensions entre les deux hommes sont notoires.
Le 5 avril dernier, à la suite d'une attaque chimique meurtrière en Syrie imputée au régime de Bachar al Assad, Alain Juppé s'en était pris implicitement à François Fillon, qui prône le dialogue avec les autorités syriennes, en écrivant sur Twitter : "Les tenants de la 'realpolitik' vont-ils encore oser nous expliquer que le régime de Bachar el Assad est un partenaire fréquentable ??"
"Alain Juppé a souhaité se mettre en retrait de la campagne nationale, mais il a toujours été très clair sur son soutien à François Fillon", a assuré Virginie Calmels.
(Sophie Louet, édité par Yves Clarisse)