Le secteur agroalimentaire a claqué jeudi la porte du Medef, fragilisant ainsi Laurence Parisot qui perd l'un de ses soutiens avant de briguer, dans six mois, un second mandat à la tête de l'organisation patronale.
L'Association nationale des industries alimentaires (Ania) a décidé de quitter le Medef lors d'un vote à bulletins secrets et à l'issue d'un "long débat", a annoncé à l'AFP son président Jean-René Buisson.
Sur 33 votants, 18 se sont prononcés pour la sortie, 12 contre et trois se sont abstenus lors du conseil d'administration de l'Ania, qui réunit 10.500 entreprises, très majoritairement petites et moyennes, mais aussi de grands groupes comme Danone, Pernod-Ricard ou Bonduelle.
"La raison essentielle de cette sortie est la question que l'on se pose depuis un certain temps sur le rapport entre les prestations et les cotisations, le rapport qualité/coût que l'on a", a précisé Jean-René Buisson.
Les cotisations d'adhésion au Medef représentent pour l'Ania quelque 623.000 euros, soit 16% de son budget.
La filière agroalimentaire n'a pas été sensible aux efforts de l'organisation patronale qui, face à la menace d'un départ, venait d'octroyer une "remise exceptionnelle" de 6% à tous ses adhérents pour 2010.
Dans un communiqué, Laurence Parisot a "regretté" cette défection, appelant les entreprises à être "solidaires, unies, soudées en cette période de crise".
Un de ses proches, le président de la commission économique du Medef Pierre Nanterme, a déclaré à l'AFP qu'il s'agissait d'une "affaire interne à l'Ania" et que l'organisation patronale demeurait "l'endroit où on défend le mieux les intérêts des entreprises et des entrepreneurs".
Ce départ ne devrait pas plomber les comptes du Mouvement des entreprises de France (Medef). L'agroalimentaire n'est que son 11e contributeur financier, avec 2,6% des cotisations totales, loin derrière des secteurs comme la métallurgie (10,1%) ou la banque (8,2%).
Mais la décision de l'Ania est symbolique à la veille d'une année électorale.
Jean-René Buisson - qui n'a pas voulu préciser s'il avait voté pour ou contre le départ - est un membre de poids du Medef, dont il préside la commission protection sociale et qu'il représente au Conseil économique et social. Surtout, il a été un des principaux soutiens de Laurence Parisot lors de son élection à la présidence du Medef en 2005, au terme d'une campagne disputée.
Egalement soutenue par le Groupement des professions de services (GPS), la dirigeante de l'institut de sondages Ifop avait damé le pion au candidat de l'Union des industries et des métiers de la métallurgie (UIMM) Yvon Jacob - une première dans les annales patronales.
Pour l'élection de l'été prochain, aucun candidat de poids ne s'est encore déclaré face à Laurence Parisot.
Le seul impétrant officiel, le petit patron Thibault Lanxade, a évoqué un "coup de tonnerre" secouant un Medef "malade" que Laurence Parisot "n'a pas su aider à recouvrer la sérénité".
La décision de l'Ania relance aussi le débat sur la stratégie de la patronne des patrons, qui a développé des thématiques sociétales comme la diversité ou l'environnement. Autant de sujets "éloignés des préoccupations de crise des entreprises", selon Jean-René Buisson.
Laurence Parisot répond qu'elle maintient le cap.
"Je ne reviendrai pas en arrière sur l'engagement sociétal du Medef", a-t-elle assuré mardi devant la presse.