Les tensions autour de la "guerre des monnaies" étaient plus fortes que jamais mercredi à la veille du sommet du G20 à Séoul, les principaux pays de la planète critiquant vertement les Etats-Unis, accusés de menacer l'équilibre économique mondial en favorisant la faiblesse du dollar.
Le président américain, Barack Obama, a toutefois coupé court à ces critiques dans une lettre en forme de plaidoyer pour la politique américaine, diffusée peu après son arrivée mercredi soir à Séoul.
"La force du dollar repose au final sur la vigueur de l'économie américaine", explique M. Obama. De même, une reprise américaine forte, créatrice d'emplois et de richesses, est le meilleur service que les Etats-Unis puissent rendre à l'économie mondiale, souligne-t-il dans ce texte.
Le Premier ministre britannique David Cameron a de son côté appelé la Chine mercredi à oeuvrer avec le G20 "pour rééquilibrer l'économie mondiale" dans un discours devant l'université de Pékin.
Le président chinois, Hu Jintao, avait plus tôt écarté ces pressions en faveur d'une réévaluation de la monnaie chinoise, le yuan, en appelant mercredi les autres pays à "prendre leurs responsabilités et à faire face à leurs propres problèmes", dans une interview diffusée par l'agence Chine nouvelle.
Signe de ces tensions, dans la capitale sud-coréenne décorée et sous haute surveillance pour accueillir les dirigeants les plus importants de la planète, une réunion mardi des représentants des ministères des Finances pour élaborer un projet de communiqué final a débouché sur un échec.
"Chaque pays est resté sur sa position de départ", a déclaré mercredi matin Kim Yoon-Kyung, porte-parole du comité présidentiel sud-coréen du G20. "Le ton est monté", a-t-il assuré. Le projet de communiqué final laisse ainsi à la discrétion des chefs d'Etat et de gouvernement le choix du paragraphe concernant les interventions sur les taux de change, selon un texte diffusé mercredi par Dow Jones Newswires.
Ce projet reprend toutefois la formulation adoptée par les ministres des Finances du G20 en octobre. "Nous allons nous orienter vers des systèmes de taux de changes davantage déterminés par le marché", indique ainsi ce texte.
Ces difficultés ont incité la ministre française des Finances Christine Lagarde, qui représentera la France jeudi soir en l'absence du président Nicolas Sarkozy, attendu vendredi matin, à se montrer prudente. La "guerre des monnaies" ne sera pas résolue en un sommet "parce que c'est une question trop compliquée", a-t-elle prévenu mercredi.
Les pays du G20, qui représentent ensemble 90% de l'économie mondiale, se réunissent pour la 5e fois depuis décembre 2008, avec pour objectif d'écarter un retour du protectionnisme, éviter une nouvelle récession mondiale après la crise financière de 2008 et réduire les déséquilibres économiques.
De ce point de vue, plusieurs pays, Chine et Allemagne en tête, ont vivement critiqué la politique de relance américaine qui affaiblit le dollar et attire des flux de capitaux spéculatifs vers les pays émergents.
La Réserve fédérale américaine vient d'annoncer l'injection de 600 milliards de liquidités supplémentaires dans l'économie à travers le rachat de bons du Trésor, une décision qui a aussi pour effet de faire baisser le billet vert et donc de favoriser les exportations américaines.
La chancelière allemande Angela Merkel a ainsi estimé que l'euro "ne doit pas supporter seul le poids" des politiques monétaires visant à affaiblir d'autres devises à un bas niveau, dans un entretien paru mercredi dans le quotidien Die Welt.
Le chef de file des ministres des Finances de la zone euro Jean-Claude Juncker a eu lui des mots inhabituellement durs contre la politique monétaire des Etats-Unis, évoquant lundi "les réflexes égoïstes" qui semblent régir les comportements de certains pays.