Après une phase d'hibernation due à la crise, l'inflation s'est réveillée fin 2010 en France avec un nouveau début de flambée des prix du pétrole, ce qui pourrait peser sur le pouvoir d'achat des ménages même si on est encore bien loin d'une surchauffe de l'économie.
Après des mois de progression quasiment nulle, les prix à la consommation ont rebondi de 0,5% en décembre par rapport à novembre, a annoncé jeudi l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee).
Comparés à décembre 2009, ils ont augmenté de 1,8% --ou de 1,7%, si on exclut le tabac-- dans la lignée de l'inflation de 2,2% enregistrée au même moment dans l'ensemble de la zone euro.
En moyenne, les prix en 2010 en France ont été en hausse de 1,5% par rapport à l'année précédente, conformément à la prévision du gouvernement, a calculé pour l'AFP l'économiste Marc Touati, d'Assya Compagnie financière.
Conséquence collatérale de l'accélération de l'inflation, le taux de rémunération du Livret A, un des placements favoris des Français, va grimper à 2% au 1er février alors qu'il était fixé à 1,75% depuis l'été dernier.
Concernant la hausse des prix elle-même, elle est liée à la poussée des produits pétroliers, le baril de brut étant passé d'environ 70 dollars à près de 100 dollars en trois mois, et à l'augmentation saisonnière des prix des services et des produits frais, relève l'Insee.
"Je ne suis pas très préoccupée" car il s'agit essentiellement d'inflation "importée", a réagi la ministre de l'Economie Christine Lagarde sur France Inter. "On peut être à peu près tranquille en étant très attentif", a-t-elle ajouté, soulignant que la France, qui préside cette année le G20 des principaux pays riches et émergents, avait justement érigé en priorité la lutte contre la volatilité des prix des matières premières énergétiques et agricoles.
Les prix de l'énergie ont augmenté de 1,9% par rapport à novembre et de 12,5% sur un an. La flambée la plus spectaculaire concerne les combustibles liquides (+5,7%, +26,5% sur un an), mais aussi les carburants (+2,7%, +15% sur un an).
Et la montée des prix pourrait se poursuivre en janvier, prédit Mathilde Lemoine, chef économiste de la banque HSBC.
D'une part, explique-t-elle, la hausse des cours de matières premières agricoles n'a pas encore été répercutée sur les prix à la consommation des produits alimentaires tandis qu'à la pompe, le coût du carburant a poursuivi sa hausse. En outre, toute une série de tarifs sont renchéris en ce début d'année (électricité, primes d'assurance suivies en février des abonnements aux "box" internet et aux téléphones portables).
A terme, cette situation pourrait s'avérer "très défavorable" pour les salariés, "car elle pèse sur leur pouvoir d'achat", prévient Victoire Dumaine-Martin, de Natixis.
Pour autant, ce timide retour de l'inflation "ne doit surtout pas être dramatisé", estime Marc Touati, d'autant que les prix des produits manufacturés n'enregistrent qu'une hausse très modérée sur un mois et même un recul sur un an, ce qui atteste, selon lui, de "la fragilité de la consommation".
Surtout, met-il en garde, cela ne doit pas conduire la Banque centrale européenne (BCE), "par excès d'orthodoxie", "à augmenter trop rapidement ses taux directeurs" pour éviter que l'inflation ne dépasse 2%, sa ligne rouge traditionnelle.
Selon l'économiste, "le peu de reprise économique que connaissent la zone euro et la France depuis environ un an risquerait alors de partir en fumée".
Or, conclut-il, "un peu d'inflation n'a jamais tué personne", c'est au contraire une situation "normale en phase de reprise".