La famille Hermès a décidé de serrer les rangs et va rassembler une majorité de ses actions dans une holding pour se prémunir d'une mainmise sur la célèbre griffe par LVMH, le numéro un mondial du luxe entré avec fracas à son capital en octobre.
L'opération, au parfum de riposte contre le groupe de Bernard Arnault, est toutefois conditionnée au feu vert du gendarme de la Bourse, l'Autorité des marchés financiers (AMF).
Dans un communiqué dimanche soir, les héritiers de Thierry Hermès ont annoncé la création d'une société holding qui rassemblera plus de 50% du capital de la maison de luxe, officiellement pour "confirmer son unité à long terme".
La décision a été prise vendredi à l'issue d'un conseil de famille destiné à étudier la contre-attaque à l'intrusion de LVMH au capital de la griffe.
Joint dimanche soir par l'AFP, le groupe de Bernard Arnault n'a pas souhaité réagir.
La vocation de la future holding sera de "détenir des actions apportées par les membres familiaux représentant plus de 50% du capital d'Hermès International". Elle "bénéficiera d'un droit de préférence sur les actions restant détenues directement par la famille", selon les termes du communiqué.
L'objectif est de protéger les parts familiales détenues par plus de soixante héritiers du fondateur de la maison du 24 Faubourg Saint-Honoré, au coeur de Paris, dont les intérêts pourraient être divergents. En clair, éviter qu'ils cèdent leurs actions à M. Arnault.
L'ensemble des héritiers détiennent 73,4% du capital d'Hermès. Le sellier s'est toujours senti protégé par son statut de société en commandite, qui permet à des groupes familiaux de conserver la gestion de leurs affaires même s'ils sont minoritaires au capital.
Jusqu'à ce que LVMH (Louis Vuitton, Givenchy, Kenzo, Céline, Fendi...) n'annonce le 23 octobre à la surprise générale avoir pris 17,1% du capital d'Hermès, déclenchant une véritable guerre de positions entre les deux camps après une arrivée "ni désirée ni sollicitée".
Le groupe de Bernard Arnault avait présenté son arrivée comme un geste "tout à fait pacifique", mais n'avait pas exclu "le cas échéant" d'autres rachats d'actions Hermès.
"L'engagement de la famille (...) est irrévocable", ont assuré dimanche les héritiers d'Hermès.
L'AMF doit approuver la création de leur holding avant sa mise en oeuvre. Mais il s'agit selon eux d'un "reclassement interne qui n’aura aucun effet sur la part de la famille au sein du capital d’Hermès International ni sur les pouvoirs de son associé commandité", donc ne nécessitant pas de dérogation.
Interrogée avant le conseil de famille, Colette Neuville, présidente de l'Association de défense des actionnaires minoritaires (Adam), avait demandé que les héritiers Hermès soient contraints à lancer une OPA sur la totalité du groupe au cas où ils créeraient une holding regroupant plus du tiers du capital. Cela permettrait aussi selon elle d'offrir une sortie aux actionnaires minoritaires.
Dans l'attente des décisions de la famille, les spéculations sur l'avenir d'Hermès avaient chahuté la semaine dernière à la Bourse de Paris le titre de la maison, qui a plongé vendredi après avoir fortement progressé.
A la clôture, l'action Hermès affichait 150,55 euros soit un repli de 9,33% par rapport à la veille, après avoir bondi de près de 20% en une semaine. Toutefois le titre est toujours en progression de près de 65% depuis le début de l'année.