Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a proposé lundi une "ouverture" au Medef pour tenter de vaincre son opposition à une hausse des cotisations sociales pour financer les retraites, lors d'ultimes consultations des partenaires sociaux, qui se poursuivent mardi.
Sans préciser les solutions retenues pour combler les 7 milliards d'euros de déficit du régime général (salariés du privé) attendus en 2020, le Premier ministre "nous a tendu la main sur une réflexion concernant la protection sociale et le coût du travail", a affirmé le président du Medef, Pierre Gattaz.
Cette réflexion pourrait s'engager dans "les semaines à venir" en contrepartie d'une hausse des cotisations pour les retraites, selon M. Gattaz. Ce dernier, favorable à un allègement pour les entreprises des cotisations liées aux allocations familiales, a salué une "ouverture", même si Jean-Marc Ayrault n'a pas précisé quelles charges pourraient être transférées.
"L'assurance a été donnée que, dès 2014" dans le projet de budget de la Sécurité sociale, "il y aura des mesures sur la compétitivité, sur les modalités de financement de la protection sociale par les régimes non contributifs", dont le plus gros est la famille, a-t-on précisé de source gouvernementale.
Un tel montage pourrait ne pas satisfaire les syndicats. "Tout dépend qui paye cette cotisation famille", a observé le président de la CFTC, Philippe Louis. "Si c'est pour faire peser sur les familles, cela ne rime à rien".
Les syndicats ont obtenu l'assurance que les règles de calcul des retraites ne seraient pas modifiées pour les générations partant d'ici à 2020, selon le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger.
A également été confirmée "la mise en place d'un compte-pénibilité", permettant aux salariés exerçant des métiers pénibles de partir plus tôt à la retraite ou de se reconvertir.
M. Ayrault a évoqué, selon la CFTC, un abaissement du seuil d'heures de Smic nécessaires pour valider un trimestre de cotisation et réfléchit, selon la CFE-CGC, à un dispositif concernant la prise en compte des années d'études.
Cotiser plus longtemps
Sur le financement, "les arbitrages ne sont pas faits", selon M. Berger. Une "réunion de travail" des ministres concernés par la réforme doit se tenir mardi en fin de journée à Matignon, selon une source gouvernementale.
La piste d'une hausse de la CSG pour financer les retraites, jugée "cohérente" il y a peu par la ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, semble fragilisée par le débat sur le poids de la fiscalité en France, car elle ponctionnerait les ménages.
Selon le secrétaire général de la CGT Thierry Lepaon, elle n'est toutefois "pas écartée". Mais "il peut y avoir plusieurs mesures qui viennent s'adosser les unes aux autres", a-t-il ajouté.
Dans une lettre au Premier ministre publiée lundi soir, M. Lepaon a préconisé, entre autres mesures, de "revenir sur les 200 milliards d'euros d'aides publiques aux entreprises", via notamment la suppression des exonérations de cotisations sociales" non efficaces "en matière d'incitation à l'emploi stable", ou encore de moduler la cotisation employeur selon sa politique salariale et d'emploi notamment.
Cotiser plus longtemps
La CGT, FO, FSU et Solidaires ont appelé à une journée de mobilisation le 10 septembre.
La CGPME (petites et moyennes entreprises) a exprimé son opposition à une hausse de la CSG, sauf si c'était pour aligner le taux des retraités (6,6% maximum) sur celui des actifs (7,5%).
Une hausse de 0,1 point des cotisations sur quatre ans (2014-2017) rapporterait 2,6 milliards d'euros, selon le rapport Moreau, tandis que 0,5 point de CSG supplémentaire représente 6,1 milliards d'euros.
Ces rendez-vous doivent clore la concertation sur la réforme des retraites, lancée lors de la conférence sociale, en juin. Le projet de loi doit être présenté en Conseil des ministres le 18 septembre.
Jean-Marc Ayrault a assuré dimanche qu'il n'était "pas question" de relever l'âge légal de départ, fixé à 62 ans. Mais retraités, actifs, entreprises, tout le monde sera mis à contribution, a-t-il réaffirmé.
A terme, le gouvernement privilégie l'allongement de la durée de cotisation nécessaire pour une retraite à taux plein, actuellement de 41,5 ans. Laurent Berger a évoqué une durée de "43 ans en 2035" mais jugé "hors de question" d'aller au-delà.
De nombreux élus UMP ont accusé le gouvernement de manquer de "courage", tel l'ex-ministre Bruno Le Maire qui l'a qualifié de "lâche". Le leader du Modem, François Bayrou, a estimé qu'une hausse des cotisations serait "le même type de bricolage" que lors des réformes précédentes.