Deutsche Bank tente de faire le ménage dans ses nombreux litiges juridiques, mais pas à n'importe quel tarif, comme en témoigne son refus jeudi d'acheter la paix au prix fort avec la famille de Leo Kirch et un accord au rabais de dédommagement avec la banque publique KfW.
La banque est prête à des règlements "quand cela fait économiquement sens" avait déclaré son patron Josef Ackermann lors de la présentation des résultats annuels du groupe début février.
Jeudi le directoire de la banque en a apporté la preuve en rejetant "à l'unanimité" un règlement à l'amiable onéreux pour mettre fin à une bataille judiciaire avec l'ancien magnat bavarois des médias Leo Kirch.
Leo Kirch accusait l'ancien patron de Deutsche Bank, Rolf Breuer, d'avoir mis en doute la solvabilité de son groupe lors d'une interview télévisée en 2002, ce qui avait causé selon lui l'effondrement de son empire médiatique. Il réclamait plus de trois milliards d'euros de dommages et intérêts.
Depuis sa mort l'été dernier, sa famille a poursuivi son combat.
Mi-février la presse allemande avait assuré que les deux parties étaient proches d'un accord sur un dédommagement de quelque 800 millions d'euros.
Un procès à Munich (sud) opposant la banque et les représentants de M. Kirch devrait prochainement reprendre.
Jeudi également, Deutsche Bank a annoncé avoir réglé un litige juridique remontant à la crise du crédit hypothécaire à risque (subprime) aux Etats-Unis qui l'opposait à 11 fonds d'investissement ayant appartenu à la banque allemande IKB avant d'être récupérés par la banque publique KfW.
Selon une source proche du dossier interrogée par l'AFP, les dommages et intérêts qui seront versés seront "largement en dessous" des 440 millions de dollars que les fonds lui réclamaient. Le quotidien Die Welt a évoqué une somme inférieure à 200 millions de dollars.
Mais c'est une goutte d'eau par rapport aux risques juridiques qui pèsent sur elle aux Etats-Unis, qui se chiffrent potentiellement en milliards de dollars, à cause de son rôle jugé douteux par les autorités américaines dans la crise des subprimes.
Le gouvernement américain a notamment porté plainte en mai dernier contre Deutsche Bank à propos de sa filiale de prêts hypothécaires MortgageIT. La banque allemande assure qu'elle ne savait pas que cette société qu'elle a achetée en 2007 menait des pratiques illégales, alors que selon les Etats-Unis, Deutsche Bank le savait et avait autorisé leur poursuite.
La banque allemande fait aussi partie des 17 instituts financiers contre lesquels les autorités américaines ont lancé des poursuites en septembre dernier, pour tenter de leur faire payer les très lourdes pertes subies en 2008 par deux géants américains du prêt immobilier, Fannie Mae et Freddie Mac, dont le sauvetage a coûté très cher au pays.
Sur le seul quatrième trimestre, Deutsche Bank a réglé pour 380 millions d'euros de litiges juridiques, et pour près d'un milliard d'euros sur l'ensemble de 2011.
M. Ackermann, qui va quitter son poste en mai prochain, a souligné avoir à coeur de réduire les risques au maximum comme "cadeau de départ" à ses successeurs, l'Anglo-Indien Anshu Jain et l'Allemand Jürgen Fitschen, pour ne pas leur réserver trop de mauvaises surprises.
"Nous étions l'un des grands acteurs du marché hypothécaire aux Etats-Unis, aujourd'hui c'est le prix que nous devons en payer" avait-il commenté le mois dernier.