Le parlement français a donné mardi, son feu vert au Mécanisme européen de stabilité (MES), structure commune permanente pour financer les pays en difficulté de la zone euro, dans un climat de polémique politique attisée par la campagne électorale.
Ce vote intervient alors que le sommet de la zone euro prévu le 2 mars à la fin du sommet européen des 27 a été annulé en raison des réticences de l'Allemagne à discuter des moyens alloués au MES, ce "pare-feu" contre les crises des dettes.
Le Sénat a à son tour, après l'Assemblée nationale le 21 février, approuvé mardi les deux traités qui vont remplacer à terme l'actuel Fonds européen de solidarité (FESF) par le MES.
Le premier texte, qui modifie un article du traité de l'Union européenne, autorise la création d'un tel mécanisme, tandis que le second traité fixe ses modalités de fonctionnement.
Ces deux traités sont juridiquement distincts du pacte de stabilité budgétaire (TSCG) conclu entre 25 pays de l'UE, qui doit être officiellement signé le 1er mars et que François Hollande veut renégocier. Mais un lien fort existe entre les deux car les prêts du MES ne pourront être accordés qu'à des pays membres du pacte.
Ce lien a justifié l'abstention socialiste. La gauche s'est toutefois divisée, les communistes du Front de gauche votant contre. les écologistes ont voté contre le 2e traité et se sont abstenus sur le premier qui approuve le principe "d'une mutualisation des dettes dans l'UE". Une vingtaine de députés PS ont également contre.
Cette abstention, qualifiée de "faute historique" par le Premier ministre François Fillon, a provoqué la colère de la droite.
"La discipline, c'est la garantie que tous les Etats européens feront les efforts indispensables", a soutenu Jean Leonetti (Affaires européennes). "Ce mécanisme européen défend les pays en difficulté et se bat contre la finance, il ne suffit pas de dire que la finance est l'ennemi et d'appeler à la solidarité sans compensation", a-t-il lancé faisant référence à François Hollande.
Cette abstention est "difficilement compréhensible même si on a des réserves techniques", a renchéri le président UMP de la commission des Finances, Philippe Marini. Marie-Hélène des Esgaulx (UMP) a fustigé le "manque de courage" de la gauche.
"Conditionner le MES à la ratification du TSCG (pacte de stabilité budgétaire) montre bien que ce qui est recherché n'est pas la discipline budgétaire dans les Etats aidés mais l'adhésion à une conception de la politique économique qui privilégie l'austérité au détriment de la croissance", a répliqué la rapporteure générale PS de la commission des Finances du Sénat, Nicole Bricq. Le PS a critiqué la "modestie" des moyens et l'absence de "branchement" avec la Banque centrale européenne (BCE).
Le MES "avec 500 milliards d'euros, peut-il être un pare-feu suffisant ?", s'est demandé Simon Sutour, président de la commission des Affaires européennes. Pour lui, le MES doit "accéder au guichet de la BCE" afin de "démultiplier sa capacité d'action". Le MES est "opaque" et "illusoire", a reproché Jean-Pierre Chevènement (RDSE, à majorité PRG).
"Le MES est imprégné de la vision ultra-libérale qui prédomine aujourd'hui entre Merkel et Sarkozy", a protesté le patron des sénateurs écologistes Jean-Vincent Placé. Les sénateurs communistes ont défendu en vain deux motions de procédures contre "l'instrument de l'autérité permanente pour l'ensemble des Européens", selon les termes d'Eric Bocquet.