La zone euro, toujours sous pression des agences de notation, peine à convaincre les marchés de sa capacité à sortir durablement de la crise, en dépit des tentatives des dirigeants européens pour rassurer sur la validité juridique de leur nouveau "pacte budgétaire".
Signe de ce climat d'incertitude, les places financières européennes ont beaucoup hésité mardi matin, jouant au yo-yo avant de finir en baisse, à l'exception de la City de Londres.
L'euro a aussi pâti d'un regain d'inquiétude, tombant sous le seuil de 1,31 dollar pour la première fois depuis janvier.
"La dette européenne continue de dominer l'agenda des marchés boursiers mondiaux, alors que les investisseurs se montrent extrêmement méfiants sur les prochains développements", a résumé Terry Pratt, analyste chez IG Markets.
Les marchés doutent des solutions issues du dernier sommet de Bruxelles, qui a insisté sur une plus grande discipline budgétaire.
A ceux qui déplorent l'absence d'avancées concrètes sur les mécanismes de solidarité, la chancelière allemande Angela Merkel a répondu mardi en refusant, selon des députés du Bundestag, à nouveau tout renforcement des capacités d'intervention du futur fonds de secours permanent de la zone euro.
Dès lundi, les agences de notation ont recommencé à mettre la pression sur l'Europe, déjà sous la menace d'un abaissement de la note de l'Allemagne et la France par Standard & Poor's. Après Moody's qui a jugé le sommet insuffisant, Fitch a regretté l'absence de "solution exhaustive" à la crise de la dette.
Les présidents de l'Union européenne Herman Van Rompuy et de la Commission européenne José Manuel Barroso ont insisté mardi devant le Parlement européen sur les avancées du sommet de Bruxelles.
"Quand cette crise sera derrière nous, on verra ce qu'on aura réalisé dans l'année 2010 et 2011 et ce que l'on vit maintenant comme un +annus horribilis+ (une année horrible) sera un jour considéré comme un +annus mirabilis+ (miraculeuse)", a assuré Herman Van Rompuy, résolument "optimiste".
La Commission a de son côté tenté de dissiper les inquiétudes juridiques entourant la future "Union de stabilité budgétaire", censée naître avec l'accord intergouvernemental qui doit être signé en mars par les Etats de la zone euro et neuf autres pays européens -- tous les membres de l'UE hormis le Royaume-Uni.
"Nous veillons à ce que le futur texte soit juridiquement compatible avec les traités européens et garantisse les compétences des institutions européennes notamment la Cour européenne de justice (CEJ) et la Commission", a affirmé un porte-parole de l'exécutif communautaire, Olivier Bailly.
La traduction juridique de l'accord du 9 décembre devrait intervenir d'ici la fin du mois.
La République tchèque, un des Etats non membres de la zone euro qui envisagent d'adhérer au texte, a d'ailleurs fait savoir mardi qu'elle ne le fera qu'après avoir pris connaissance de sa rédaction définitive.
Il s'agit de faire la lumière sur plusieurs zones d'ombre qui subsistent et que Londres, resté à l'écart, pourrait invoquer pour s'opposer au recours aux institutions européennes par les seuls 26 autres membres de l'UE.
L'isolement britannique a une nouvelle fois été critiqué en Europe.
José Manuel Barroso a estimé que les exigences du Premier ministre David Cameron en échange de son soutien à un changement de traité "posaient un risque à l'intégrité du marché unique".
Mais les attaques les plus virulentes sont venues du Parlement européen.
Le Parti populaire européen (PPE, conservateur) a vilipendé "des attitudes nationalistes et égoïstes", tandis que le chef de file des Libéraux et démocrates européens, l'ancien Premier ministre belge Guy Verhofstadt, assurait que David Cameron avait "fait la gaffe de sa vie".
Au-delà des questions juridiques, l'incertitude politique règne aussi dans plusieurs pays, comme la France, où la promesse du socialiste François Hollande, favori des sondages pour la présidentielle du printemps 2012, de renégocier l'accord de Bruxelles en cas de victoire fait des vagues.
D'autres mauvaises nouvelles continuent d'inquiéter les marchés.
Les dépôts des banques de la zone euro auprès de la Banque centrale européenne (BCE) ont atteint mardi un nouveau plus haut depuis 18 mois, signe de la persistance de leur méfiance à se prêter entre elles.
En Belgique, le déficit budgétaire atteindra 4,2% du PIB fin 2011, bien au-delà de l'objectif officiel de 3,6%, selon une étude de la Banque nationale citée par le quotidien économique bruxellois L'Echo.
Rare note d'optimisme, le déficit public du Portugal serait, lui, moins important que prévu, à 4,5% du PIB au pire en 2011, nettement en-deçà de l'objectif de 5,9%.
Et la confiance des milieux financiers allemands dans les perspectives économiques de leur pays pour les six mois à venir a contre toute attente un peu progressé en décembre, sans doute grâce au sommet européen.
Les marchés pourraient aussi trouver des raisons d'espérer auprès de la Réserve fédérale américaine, qui était réunie à Washington et devrait préparer les esprits à un nouvel assouplissement de sa politique monétaire pour soutenir encore davantage l'économie américaine.