Le président russe Dmitri Medvedev s'est attaqué jeudi aux conglomérats publics, apparus pour la plupart sous la présidence de Vladimir Poutine, estimant qu'ils étaient "sans avenir" et qu'il fallait à terme soit les liquider, soit les transformer en sociétés par actions.
"Je considère cette forme (d'entreprise) sans avenir globalement dans les conditions actuelles", a déclaré le chef de l'Etat dans son discours annuel à la Nation.
Ces structures étatiques "doivent être liquidées à la fin de leur mission, et celles qui oeuvrent dans un environnement commercial, concurrentiel, doivent être avec le temps transformées en sociétés par actions, contrôlées par l'Etat", a-t-il estimé.
"Ces dernières resteront ensuite dans le secteur étatique, là où elles sont indispensables, ou seront transférées à des investisseurs privés", a poursuivi M. Medvedev.
Au nombre de sept aujourd'hui, ces méga-entreprises publiques sont apparues lors de la présidence de son prédécesseur, Vladimir Poutine, qui reste considéré comme l'homme fort de la Russie.
Ces mastodontes regroupent une multitude de sociétés, privées ou publiques, dans des secteurs tels que les nanotechnologies (Rosnano), l'énergie atomique (Rosatom), ou encore la finance (Vnechekonombank, ou VEB).
Selon le conseiller économique du Kremlin, Arkadi Dvorkovitch, la VEB, Rosnano et Rostekhnologui pourraient être transformées "dès l'an prochain" en "sociétés communes".
Certaines de ces entités avaient été créées pour un objectif bien précis et avec une durée limitée de vie, à l'image de l'entreprise de construction Olimpstroï, mise sur pied dans la perspective des Jeux Olympiques de 2014 à Sotchi (sud de la Russie).
Mais ces géants sont depuis plusieurs mois dans la ligne de mire de M. Medvedev.
Le 7 août, il avait chargé le procureur général de Russie Iouri Tchaïka et le chef du département de contrôle du Kremlin Konstantin Tchouïtchenko de procéder à un audit.
Et fin octobre, il avait déclaré lors d'une rencontre avec plusieurs oligarques que les autorités avaient perdu "le contrôle sur leur création".
Mercredi, M. Tchaïka a informé le chef de l'Etat que 22 poursuites avaient été engagées contre des entreprises appartenant à ces conglomérats, accusées d'avoir dépensé à mauvais escient l'argent qui leur avait été alloué.
Un plan sur la transformation de ces entreprises doit être élaboré d'ici le 1er mars 2010, a de son côté indiqué M. Tchouïtchenko.
Mercredi, le chef du patronat russe, Alexandre Chokhine, avait critiqué ces structures dans un entretien au quotidien officiel Rossiiskaïa Gazeta.
"L'Etat, à travers les entreprises publiques, va sur le terrain des affaires privées. Et en passant, s'accorde la préférence. La concurrence est faussée, le climat d'affaires se détériore, l'initiative privée est enterrée", avait-il dit.
Selon certains analystes, la structure opaque de ces entités a permis à des proches de M. Poutine, tels que Sergueï Tchemezov, patron de Rostekhnologii, un mastodonte hétéroclite qui chapeaute près de 400 entreprises, allant du secteur de l'armement à celui de l'automobile, d'agir sans avoir de comptes à rendre.
Les conglomérats sont "les bébés de M. Poutine, dans lesquelles d'énormes sommes d'argent sont injectées", a commenté à l'AFP l'expert indépendant Alexandre Konovalov.
"La déclaration selon laquelle d'une façon ou d'une autre elles vont être fermées dans un futur proche est une attaque à la stabilité financière du clan de Poutine", a-t-il jugé.