La banque suisse UBS et certains fonds et personnalités associés se voient réclamer deux milliards de dollars aux Etats-Unis par le liquidateur judiciaire chargé de récupérer des fonds pour les victimes de l'affaire Madoff.
"Madoff n'a pas agi seul pour commettre la plus grande fraude financière de l'histoire", a fait valoir mercredi le liquidateur Irving Picard dans sa plainte, arguant qu'UBS et ses co-accusés ont "prêté leur nom prestigieux pour légitimer" l'escroc.
UBS s'est défendue, affirmant que les accusations la visant étaient fausses, et qu'elle n'était "pas responsable" de la ruine d'investisseurs qui avaient confié en toute connaissance de cause leurs biens au financier new-yorkais, condamné à l'an dernier la prison à vie aux Etats-Unis après une fraude évaluée à 50 milliards de dollars.
Le document de 107 pages aligne 23 accusations de fraudes, principalement contre UBS et des fonds associés, ainsi que certains responsables de la société AIA, fondée par les Français Patrick Littaye et Thierry de La Villehuchet, qui s'était suicidé dans son bureau à New York il y a près de deux ans à la suite de l'arrestation de M. Madoff.
"Les accusés UBS, fonds associés à UBS et fonds rabatteurs doivent être condamnés à verser au moins 2 milliards de dollars pour le rôle qu'ils ont joué pour masquer et faire durer la fraude, le montant exact devrant être déterminé lors d'un procès", estime M. Picard.
Les fonds rabatteurs recrutaient des investisseurs en leur recommandant de confier leur fortune aux produits financiers de Bernard Madoff.
Selon le liquidateur, "la machination de Madoff n'aurait pas pu être perpétrée si UBS et ses co-accusés n'avaient pas accepté de détourner le regard et de prétendre qu'ils confirmaient véritablement l'existence d'actifs et de transactions, alors qu'ils ne l'avaient jamais fait".
La plupart des acteurs poursuivis dans cette plainte sont également en butte à des procédures en Europe.
A Paris, UBS a été assignée en justice au printemps pour tromperie par 80 investisseurs ayant perdu leur argent placé dans le fonds luxembourgeois LuxAlpha, dont la banque suisse était dépositaire. Ces investisseurs réclament 100.000 euros chacun.
En outre, Patrick Littaye, visé par la plainte de M. Picard, avait été mis en examen en 2009 en France pour "complicité d'abus de confiance". Toutefois ce statut a été modifié en janvier: il n'est plus que "témoin assisté", ce qui le met à mi-chemin entre un simple témoignage et une mise en examen.
AIA gérait environ 2 milliards d'euros d'actifs pour le compte de clients européens, dont 1,5 milliard étaient investis chez Madoff. La veuve de M. de La Villehuchet, Claudine, résidente de l'Etat de New York, est poursuivie par M. Picard en tant que seule héritière.
UBS a fait valoir mercredi que LuxAlpha avait été créé "à la demande explicite de clients fortunés qui voulaient un fonds sur-mesure leur permettant de continuer à investir avec Madoff". "Ces clients étaient représentés par des institutions financières pleinement au courant de la nature des investissements", a ajouté la banque suisse.
Reste que c'est un nouveau coup dur pour UBS, qui a déjà été au centre d'un long bras de fer entre les autorités américaines et suisses sur le secret bancaire. L'affaire lui a coûté 780 millions de dollars.
La semaine dernière, les autorités suisses avaient annoncé que les poursuites lancées au civil en 2009 par le fisc américain contre UBS en 2009 étaient finalement arrêtées, après la transmission aux Etats-Unis d'environ 4.000 dossiers de fraudeurs présumés du fisc américain.