BAGDAD/PARIS (Reuters) - Le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a évoqué dimanche la possibilité de fournir des armes aux forces kurdes irakiennes pour les aider à combattre les djihadistes de l'Etat islamique.
En visite en Irak, il a appelé à la formation d'un gouvernement d'union nationale pour faire face à l'offensive des combattants islamiques mais a exclu une intervention militaire française sur le terrain.
Le chef de la diplomatie française s'est rendu successivement à Bagdad puis à Erbil, la capitale du Kurdistan irakien, pour superviser la livraison d'une aide humanitaire destinée aux réfugiés chrétiens et yazidis qui ont fui en masse devant l'avancée de l'Etat islamique.
Lors d'une conférence de presse commune, le président du gouvernement régional du Kurdistan irakien (GRK) Massoud Barzani, a appelé la communauté internationale à fournir des armes aux Kurdes pour les aider à repousser la menace islamiste.
"C'est vrai que les Kurdes et d'une façon générale les Irakiens m'ont dit à quel point le califat islamique, ce que j'appelle le califat de la haine, a pris des armes très sophistiquées prélevées sur l'armée irakienne", a dit Laurent Fabius dimanche soir sur France 2.
A la question de savoir si des livraisons d'armes étaient envisageables, il a répondu: "Il faudra d'une manière ou d'une autre qu'ils puissent être livrés d'une façon sûre en matériel qui leur permette de se défendre et de contre-attaquer."
"Nous verrons ça dans les jours qui viennent en liaison avec les Européens", a-t-il ajouté.
Mais il a exclu toute intervention militaire française sur le terrain, déclarant: "Est-ce que nous-mêmes nous allons nous impliquer militairement ? La réponse pour le moment est 'non', je vous le dis clairement."
PONT EUROPÉEN DE SOLIDARITÉ
Laurent Fabius a encore indiqué qu'il demanderait à l'Union européenne la mise en place d'un "pont de solidarité" pour venir en aide aux réfugiés qui ont fui l'avancée des djihadistes de l'Etat islamique.
A Bagdad, dans la matinée, il avait repris le credo des dirigeants occidentaux, notamment américains, en appelant les parlementaires irakiens à désigner un nouveau Premier ministre capable de dépasser les divisions confessionnelles.
Le chef du gouvernement sortant, le chiite Nouri al Maliki, est accusé d'avoir attisé le ressentiment de la population sunnite, favorisant la progression des intégristes de l'Etat islamique.
"L'Irak a besoin d'un gouvernement d'unité, de large unité", a dit le ministre français. "Il faut que tous les Irakiens se sentent représentés et puissent mener la bataille contre le terrorisme. Le mot d'ordre, c'est la solidarité", a-t-il ajouté lors d'une conférence de presse avec son homologue irakien Hochiar Zebari.
La France a envoyé dimanche à Erbil une cargaison de 18 tonnes de médicaments et de matériel d'urgence destinés aux réfugiés. Un nouveau vol humanitaire est prévu dans la semaine "et il est tout à fait possible que nous procédions à des parachutages", a encore indiqué Laurent Fabius.
Le ministre a annoncé son intention de lancer, dès son retour en France lundi, un "pont européen de solidarité" pour venir en aide aux populations déplacées d'Irak.
"La France fait tout ce qu'elle peut faire mais ce n'est pas suffisant. Si l'ensemble des 27 pays (de l'Union européenne) se mettent d'accord pour pratiquer un pont de solidarité européen sur toute une série de biens nécessaires, je pense que ce sera très apprécié", a-t-il souligné. "C'est ce que m'a demandé le président du Kurdistan."
(Isabel Coles à Bagdad, Henri-Pierre André, Tangi Salaün et Yann le Guernigou à Paris, édité par Danielle Rouquié)