La Chine commence à marquer des points dans la lutte contre l'inflation, qui a légèrement fléchi en avril, et affiche sa détermination à ne pas laisser déraper les prix, comme le groupe Unilever vient d'en faire l'amère expérience.
Sur un an, l'indice des prix à la consommation a progressé de 5,3% le mois dernier contre 5,4% en mars. Mais par rapport au mois dernier, les aliments étaient en moyenne 0,4% moins cher qu'en mars.
"L'impact des prix alimentaires sur l'indice des prix à la consommation a diminué en avril", s'est réjoui Sheng Laiyun, porte-parole du Bureau national des statistiques (BNS), lors d'un point de presse.
Il a expliqué que "les prix des légumes ont baissé grâce à une météo plus favorable et une offre plus abondante".
Pour éviter un emballement de l'inflation, la banque centrale a relevé quatre fois depuis octobre les taux d'intérêt et plus de fois encore les réserves obligatoires des banques, limitant la quantité d'argent qu'elles peuvent prêter et donc la quantité de monnaie en circulation.
"Le problème le plus pressant auquel nous faisons face actuellement est l'inflation", a déclaré cette semaine à la télévision américaine le vice-Premier ministre chinois Wang Qishan, en marge du dialogue stratégique et économique sino-américain.
En avril, le chef du gouvernement, Wen Jiabao, s'était engagé à augmenter la flexibilité du taux de change de la monnaie chinoise, dont la sous-évaluation contribue à l'accumulation colossale de réserves de change par la banque centrale, qui en échange injecte un montant équivalent de yuans dans l'économie.
Le potentiel déstabilisateur pour le pouvoir de l'inflation a été mis en exergue le mois dernier par une grève des routiers du port conteneur de Shanghai, le plus grand du monde. Les chauffeurs se plaignaient d'une baisse de leur revenus consécutive à des hausses de prix du carburant.
Pour afficher sa détermination à lutter contre l'inflation, le gouvernement a aussi demandé à plusieurs fabricants et distributeurs d'articles de première nécessité de ne pas augmenter leurs prix.
Le géant anglo-néerlandais d'agroalimentaire et de cosmétiques Unilever devra pour sa part s'acquitter de deux millions de yuans (214.000 d'euros) d'amende pour avoir provoqué une ruée vers des détergents et shampoings en "diffusant illégalement des nouvelles sur des hausses de prix", selon la Commission nationale pour le développement et la réforme.
"Le fait que le gouvernement ait commencé à mettre à l'amende des sociétés étrangères en dit long sur l'inquiétude du gouvernement à propos de l'inflation", estime Ren Xianfang, économiste chez IHS Global Insight à Pékin.
Unilever pourrait ne pas avoir été choisi au hasard, ou pour son seul poids économique.
L'exposition de l'artiste dissident Ai Weiwei qui s'est terminée début mai à Londres était sponsorisée par le groupe anglo-néerlandais dans le cadre de son partenariat avec la Modern Tate intitulé "The Unilever Series". Ai a été arrêté à Pékin le 3 avril.
Les mesures prises par le gouvernement pour contrôler l'inflation "ont eu des effets initiaux positifs", selon le porte-parole du BNS, qui a toutefois ajouté que "la pression inflationniste était toujours élevée à cause de la situation en Chine et à l'étranger".
Selon l'économiste Tim Condon de la banque ING cité par l'agence Dow Jones, "le pire est passé sur le front de l'inflation" et le chiffre du mois d'avril "suscite l'espoir que l'indice des prix va ralentir sa progression au deuxième semestre".
Mais le combat contre l'inflation est loin d'être terminé, notamment parce que la Chine continue à accumuler des réserves de change et reçoit beaucoup de capitaux étrangers. "L'afflux de liquidités va continuer à exercer une pression à la hausse (sur les prix) tout au long de l'année", selon un commentaire du cabinet IHS.