La commission d'instruction de la Cour de Justice de la République (CJR) a été saisie pour enquêter sur le rôle joué en 2008 dans l'affaire Tapie/Crédit Lyonnais par la nouvelle directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) Christine Lagarde, a annoncé mardi le parquet général près la Cour de cassation.
Cette saisine était obligatoire après la décision prise le 4 août par la CJR - chargée de juger des faits commis par des membres du gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions - d'ouvrir une enquête sur l'ex-ministre de l'Economie.
La commission d'instruction, composée de trois magistrats de la Cour de cassation, mènera des investigations pour savoir si l'ex-ministre s'est rendue coupable de "complicité de faux" et "complicité de détournement de biens publics", délits passibles de dix ans de prison et 150.000 euros d'amende.
Les faits concernent l'arbitrage ayant mis fin en juillet 2008 au conflit entre Bernard Tapie et l'ancienne banque publique Crédit Lyonnais, au sujet de la vente d'Adidas en 1993.
Le tribunal arbitral, juridiction privée, avait condamné le Consortium de Réalisation (CDR), structure publique qui gérait le passif du Crédit Lyonnais, à verser à l'homme d'affaires 285 millions d'euros d'indemnités (400 millions avec les intérêts). Il aurait selon des parlementaires touché au bout du compte plus de 200 millions d'euros.
Le 4 août, la commission des requêtes de la CJR, qui avait été saisie par le procureur général près la Cour de cassation Jean-Louis Nadal à la demande de députés socialistes, avait donné un avis favorable à l'ouverture d'une enquête.
On reproche à Mme Lagarde d'avoir recouru à cet arbitrage privé alors qu'il s'agissait de deniers publics, d'avoir eu connaissance de la partialité de certains juges arbitres et de ne pas avoir exercé de recours contre cet arbitrage controversé.
L'enquête devra notamment déterminer si elle a été complice d'une modification du protocole initial, ayant permis aux époux Tapie de toucher 45 millions d'euros au seul titre du préjudice moral.
Les investigations promettent d'être longues et même si Mme Lagarde était renvoyée devant la CJR, un procès n'aurait probablement pas lieu avant plusieurs années.
Depuis sa création en 1993, la CJR a examiné plus d'un millier de plaintes et n'a jugé que six ministres.