PARIS (Reuters) - François Hollande s'est de nouveau immiscé mardi dans le débat politique en désapprouvant l'idée d'Emmanuel Macron de prendre aux partenaires sociaux la gestion de l'assurance chômage, tout en dénonçant la "brutalité" du programme de François Fillon.
A moins de deux semaines du premier tour de la primaire de la gauche, le chef de l'Etat a demandé que l'élection présidentielle du printemps soit l'occasion de "débats maîtrisés et surtout l'affirmation d'un véritable choix."
Dans ses voeux aux corps constitués et aux bureaux des assemblées, celui qui a renoncé à briguer un second mandat a mis en garde contre le populisme "qui utilise les peurs, le désarroi" au point de "parfois, altérer les décisions".
Lors des derniers voeux aux partenaires sociaux de son quinquennat prononcés dans la matinée, François Hollande avait dressé "un bilan contrasté" de l'état du dialogue social en France, soulignant qu'"au niveau national, l'élan contractuel a perdu de sa vigueur, certains ont parfois préféré renvoyer la responsabilité au gouvernement".
Il a à ce propos évoqué la négociation sur la prochaine convention d'assurance chômage, interrompue sine die en raison des divergences entre les partenaires sociaux.
Il a souligné que d'autres modèles étaient possibles, dont l'étatisation, c'est-à-dire la reprise en main de l'assurance chômage, "mais ce serait la fin du système fondé sur des cotisations assises sur les salaires et donc la fin d'une indemnisation sur les revenus antérieurs", a-t-il dit.
Face à cette idée, portée en particulier par son ancien ministre de l'Economie Emmanuel Macron, qu'il n'a pas nommé, les partenaires sociaux sont selon lui conscients que "le paritarisme doit être prolongé, non pas prolongé parce que ce serait l'Histoire mais prolongé parce que c'est l'avenir".
"BRUTALITÉ"
"Parce qu'il est bon que les acteurs économiques et sociaux définissent pour eux-mêmes les règles notamment sur la question de l'indemnisation du chômage ou l'incitation à la reprise d'activité", a-t-il ajouté.
Candidat à la présidentielle d'avril-mai sans passer par la primaire organisée par le PS, Emmanuel Macron propose de supprimer le système actuel d'assurance chômage pour le remplacer par un autre reposant sur la solidarité nationale.
Il compte ainsi, s'il est élu, supprimer les cotisations chômage payées par les salariés, étendre le bénéfice des allocations chômage à l'ensemble des travailleurs et reprendre en main l'Unedic - le gestionnaire de l'assurance chômage géré par les partenaires sociaux.
La suppression des cotisations chômage, qui doit apporter un gain financier aux salariés, serait en partie compensée par une hausse de la CSG, assise sur tous les types de revenus.
François Hollande a ensuite mis en garde contre la tentation d'ignorer les partenaires sociaux, une critique adressée au candidat Les Républicains François Fillon.
"Je pense que ce risque est finalement plus élevé que de faire confiance aux partenaires sociaux et ensuite au législateur. Car le risque, c'est le blocage, le risque, c'est que face à la brutalité, il y ait une autre brutalité", a-t-il dit.
Dans ses voeux aux corps constitués, François Hollande a dans la soirée aussi visé le candidat de la droite en réprouvant l'idée de recourir aux ordonnances pour légiférer rapidement, surtout en début de mandat.
"Au nom d'une impatience que l'on peut parfois comprendre ou d'une rupture dont il faut toujours se garder, les propositions fleurissent pour justifier un recours aux ordonnance ou l'organisation de référendum, comme s'il fallait à tout prix sauter l'obstacle du Parlement au moment même où l'Assemblée nationale aura été renouvelée", a dit le président.
"Mieux vaut changer la procédure législative plutôt que de se lancer dans ce type d'initiative", a-t-il considéré.
(Jean-Baptiste Vey et Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse)