Un comité d'entreprise, la puissante Caisse centrale d'activités sociales des industries électriques et gazières (CCAS), gérée par la CGT, a acheté une société cotée en Bourse, André Trigano, numéro un français des campings et bungalows, ce qui constitue une première.
Le but principal de l'opération, qui a suscité des oppositions au sein de la CGT, est de permettre aux salariés d'EDF et GDF-Suez, et de leurs sous-traitants, d'accéder plus facilement pour leurs vacances aux 44 campings ou villages de bungalows de la Compagnie internationale André Trigano (CIAT).
L'acquisition prend la forme d'une classique opération boursière, mais les dirigeants de la CCAS, peu désireux de diriger une entreprise purement capitaliste, ont annoncé leur intention de retirer la CIAT de la Bourse dès qu'ils en auront acquis plus de 95% du capital, dès le début de l'an prochain.
La CCAS a conclu la semaine dernière une série d'accords, annoncés lundi, avec les actionnaires de la CIAT, lui permettant de prendre d'ores et déjà le contrôle de 93% de son capital, avant de lancer début 2010 une offre publique d'achat (OPA) sur les actions restantes.
L'ensemble de ces opérations se font sur la base d'un prix unitaire de 48 euros par action de la CIAT, ce qui valorise son capital à 59 millions d’euros.
Le conseil d'administration de la CCAS, considérée comme le plus riche CE de France, avait approuvé le 2 décembre le projet de rachat. En revanche, les élus CGT des 3.000 salariés permanents de la CCAS (qui emploi aussi autant de saisonniers), inquiets pour l'emploi et leurs conditions de travail, avaient émis un avis défavorable.
Pour la présidente (CGT) de la Caisse, Evelyne Valentin, l'acquisition de la CIAT constitue une réponse aux difficultés du tourisme social.
Chaque année, la CCAS est obligée d'acheter des lits auprès d'autres opérateurs, dont certains issus du tourisme marchand, "pour un volume toujours plus important", avait souligné début décembre le porte-parole de la CGT-énergie, Maurice Marion.
Celle-ci avait d'ailleurs annoncé son intention de faire profiter d'autres comités d'entreprise de son nouveau parc et d'ouvrir le capital de la CIAT à d'autres partenaires de l'économie sociale. Une augmentation de capital, d'environ 20 millions d'euros, devrait intervenir d'ici avril 2010.
La CCAS gère des prestations médicales, les séjours de vacances, les assurances et la restauration d'entreprise de près de 700.000 personnes (salariés actifs ou retraités d'EDF et de GDF-Suez, ainsi que leurs familles).
La gestion de la CCAS, dont le budget annuel approche les 460 millions d'euros (provenant en majorité d'une subvention d'EDF et GDF-Suez correspondant à 1% des ventes d'électricité et de gaz), avait suscité en avril 2007 de vives critiques de la Cour des comptes.
La Cour avait notamment épinglé des coûts de fonctionnement excessifs, l'insuffisance des documents comptables et des contrôles internes, et des participations versées par les bénéficiaires peu élevées au regard des prix de revient.
Pour la Cour, les activités sociales "sont une anomalie" dans "le contexte de déréglementation du marché de l'énergie", avait répliqué la CGT, tout en prenant l'engagement de tenir compte de ses remarques.
La CCAS s'était aussi retrouvée sur le devant de la scène lorsque le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, avait été entendu en 2006 comme témoin pour savoir si une employée d'EDF détachée à CGT mines-énergie avait été affectée à son secrétariat. L'accusation n'avait pas abouti.