L'opposition portugaise a rejeté lundi les appels au dialogue du Premier ministre José Socrates, confirmant son intention de voter contre le nouveau programme d'austérité du gouvernement qui pourrait être contraint à la démission à la veille d'un sommet européen crucial.
Après avoir dramatisé toute la semaine les enjeux d'un plan d'austérité qui doit permettre d'éviter au pays un plan de sauvetage financier, M. Socrates s'était dit prêt à négocier "toutes les mesures proposées", à condition que les objectifs de réduction budgétaire "garantis" à Bruxelles soient respectés.
Lundi matin, après un entretien de 45 minutes avec le Premier ministre socialiste, le chef de l'opposition de centre-droit Pedro Passos Coelho a réaffirmé son rejet d'une "quelconque négociation avec le gouvernement", dénonçant une nouvelle fois un programme "socialement injuste", "concocté avec la Commission et la Banque centrale européennes" sans que l'opposition, les partenaires sociaux ni même le président n'aient été consultés ou informés.
Depuis un an, le Parti social-démocrate (PSD), principale force d'opposition, avait pourtant accepté d'endosser, en s'abstenant, les précédentes mesures d'austérité du gouvernement minoritaire, tout comme il avait permis à José Socrates d'échapper aux motions de censure présentées, à deux reprises, par la gauche antilibérale.
"C'est fini", a répété à plusieurs reprises M. Passos Coelho, qui n'a toutefois pas précisé si le PSD présenterait au Parlement une résolution contre le texte, comme a prévu de le faire le CDS, parti minoritaire de droite.
Pour être adoptée, une telle résolution nécessite le vote de l'ensemble de la droite parlementaire (102 élus contre 97 au PS), les 31 députés de la gauche antilibérale ayant annoncé qu'ils présenteraient leurs propres textes contre l'austérité.
Comme il s'y était engagé, le gouvernement a remis lundi soir une version détaillée de son programme d'austérité au parlement afin qu'il puisse être débattu et voté mercredi, à la veille du sommet de l'UE qui doit finaliser la réponse européenne aux crises de la dette.
Ce programme, dans lequel le gouvernement reconnaît pour la première fois la probabilité d'une récession en 2011 (-0,9% du PIB), confirme les dispositions déjà annoncées et saluées par Bruxelles, à savoir des réductions de dépenses supplémentaires en 2011, puis pour les deux années suivantes un renforcement de l'austérité, avec notamment un gel des retraites et de nouvelles mesures fiscales, déjà vivement contestés par l'opposition.
Ces derniers jours, les dirigeants socialistes ont multiplié les mises en garde contre une "crise politique gravissime" pour le pays, évoquant le risque d'une "rupture immédiate du financement de l'Etat" alors que le Portugal doit faire face à d'importantes échéances de dette (plus de 9 milliards d'euros) d'ici au 15 juin.
Lundi, le ministre chargé des relations avec le Parlement Jorge Lacao a confirmé l'hypothèse d'une démission du gouvernement, déjà envisagée la semaine dernière par M. Socrates en cas de "rejet explicite" des nouvelles mesures d'austérité qui visent à "garantir" la réduction du déficit public à 4,6% du PIB en 2011 et 3% en 2012.
Depuis Bruxelles, le ministre des Finances, Fernando Teixeira dos Santos, a une nouvelle fois mis en garde" contre les conséquences de la "crise politique" qui, a-t-il estimé, "contribue à pousser le pays dans les bras de l'aide extérieure".
Contrariant les prévisions alarmistes du gouvernement, les marchés obligataires ont peu réagi lundi à la crise politique portugaise alors que le chef de l'opposition a déjà promis "solennellement" de respecter, s'il est élu, les engagements pris par l'Etat portugais, affirmant son "soutien indéfectible" au rééquilibrage des comptes publics et aux réformes structurelles.