HSBC, la première banque britannique, a procédé vendredi à un remue-ménage choc à sa tête, au terme d'une bataille sans précédent dans cet établissement qui cultive une image de calme et de sagesse, provoquant la stupeur dans la City.
Comme la presse britannique le laissait entendre, la banque a décidé de porter à sa présidence son directeur financier, Douglas Flint, en remplacement de Stephen Green, qui entrera début 2011 au gouvernement britannique en tant que secrétaire d'Etat au Commerce.
Parallèlement, le directeur général Michael Geoghegan, en poste depuis 2006, va quitter prématurément ses fonctions, dépité selon la presse d'avoir vu lui échapper une présidence qu'il pensait acquise, conformément à une tradition en vigueur au sein du groupe. Il sera remplacé, à compter du 1er janvier, par Stuart Gulliver, qui dirige les activités d'investissement du groupe.
Ce remue-ménage a été provoqué par la nomination totalement imprévue du charismatique Stephen Green au gouvernement, début septembre. L'annonce de son départ a soudainement mis le feu aux poudres, alors que personne ne pensait le terrain miné.
"Un noeud de vipères", "de la folie pure": les commentaires -anonymes- des banquiers londoniens qui se sont épanchés ces derniers jours dans la presse donnent la mesure de l'événement.
Concurrents plus ou moins bien intentionnés, ils sont d'accord sur un point: HSBC a mis en péril une réputation bien établie, encore rehaussée par un parcours jugé sans faute lors de la récente crise financière.
La plupart des observateurs s'attendaient à ce que la tradition soit dûment respectée et que Michael Geoghegan succède à Stephen Green, selon un mécanisme parfaitement huilé.
M. Geoghegan, dont les bureaux sont établis depuis le début de l'année à Hong Kong pour marquer l'importance stratégique de l'Asie dans les activités de la banque, serait revenu siéger à Londres et l'affaire aurait été réglée.
Le grain de sable est venu d'un "non-HSBC", comme disent les analystes de la City pour désigner John Thornton, un ancien dirigeant de la banque d'affaires américaine Goldman Sachs qui avait été embauché comme administrateur par Stephen Green, précisément pour ses accointances avec la Chine.
M. Thornton est ainsi apparu en interne comme un favori possible. Mais M. Geoghegan, qui a fait toute sa carrière à HSBC, l'a fort mal pris et des "sources bien placées" ont fait savoir cette semaine au Financial Times qu'il était prêt à démissionner si M. Thornton l'emportait.
Une menace que la banque et M. Geoghegan ont qualifié d'"absurdité", sans convaincre personne.
Quand à M. Thornton, il semble avoir été mis hors jeu après qu'un ancien patron de HSBC, Sir Keith Whitson, se soit à son tour jeté dans la mêlée pour dénoncer avec indignation qu'un banquier ayant fait sa carrière "à l'extérieur" du vénérable établissement puisse en prendre la tête.
L'ancien de Goldman Sachs avait aussi pour handicap d'être immensément riche, au moment où les bonus des banquiers continuent d'être sous le feu des critiques, y compris de la part de certains membres du gouvernement.
C'est désormais l'actuel directeur financier de la banque, Douglas Flint, un Ecossais de 55 ans décrit comme "calme et autoritaire", qui a décroché la présidence. Il sera payé 1,5 million de livres (environ 1,8 million d'euros), sans bonus ni stock-options.
Le nouveau tandem qu'il formera avec Stuart Gulliver devra s'atteler sans traîner à restaurer la réputation de la banque, en espérant que cet affrontement ne laisse pas de traces trop profondes.
M. Geoghegan, qui touchera une prime de départ d'un peu moins de 1,7 million d'euros, a quant à lui assuré ne pas avoir encore trouvé de point de chute.