Le groupe bancaire BPCE, né de la fusion entre Caisse d'épargne et Banque Populaire, sera opérationnel lundi, selon la direction, malgré une décision de justice bloquant le projet en Ile-de-France.
Deuxième groupe bancaire de France avec 8.000 agences et 110.000 salariés, BPCE va vers une période délicate, en raison de sa filiale Natixis, déficitaire et lestée par un portefeuille d'actifs invendables de 33 milliards d'euros.
Alors qu'une partie du personnel continue de s'opposer à la fusion, pointant justement l'échec de Natixis, la cour d'appel de Paris a interdit à la caisse d'épargne d'Ile-de-France de mettre en oeuvre le projet, faute d'en informer valablement le personnel, dans un arrêt en référé rendu public samedi.
"Le processus nécessitait l'accord de l'ensemble des comités d'entreprise, s'il en manque un, cela remet en cause tout le projet", s'est félicité le syndicat Sud.
"Le groupe est bien opérationnel lundi, avec 16 caisses d'épargne et 20 banques populaires, mais pas en Ile-de-France pour respecter la décision du juge. La 17ème caisse d'épargne nous rejoindra ultérieurement", a-t-on affirmé au contraire à la Caisse d'épargne d'Ile-de-France.
L'opération avait été finalisée vendredi, après de nombreux rebondissements, par le vote des assemblées générales extraordinaires.
Partenaires depuis 2006 et la création de leur filiale commune Natixis, Banque Populaire et Caisse d'Epargne ont lancé leur fusion en octobre 2008.
Impatient, après quatre mois de vaines négociations, le gouvernement s'est invité dans le dossier, imposant la nomination controversée du secrétaire général adjoint de l'Elysée François Pérol à la tête du nouvel ensemble, ainsi que son entrée au capital.
Détenteur d'actions dites de préférence, privées de droits de vote, l'Etat contrôle actuellement environ 16% du capital de la BPCE. Une participation qui a vocation à être rachetée par le groupe dans les cinq ans.
L'Etat a aussi injecté sept milliards d'euros depuis fin 2008, dont le remboursement se fera dans la mesure où la "situation de solvabilité" du groupe et ses résultats lui "permettront de le faire", selon M. Pérol.
BPCE ne connaîtra pas d'état de grâce : sa filiale Natixis a déjà perdu 4,6 milliards d'euros depuis début 2008, et sa situation demeure préoccupante malgré l'injection de neuf milliards d'euros depuis 2008.
La rumeur d'une nouvelle intervention de l'Etat, via une structure de défaisance similaire à celle du Crédit Lyonnais, a agité les marchés cette semaine, hypothèse qui avait été écartée à court terme par la ministre de l'Economie Christine Lagarde fin mai.
Pour Pierre Flabbée, analyste de Kepler Capital Markets, la constitution d'un organe central unique pour chapeauter Natixis "devrait fluidifier les décisions stratégiques".
Délégué du syndicat SNB-CFE/CGC, Régis Dos Santos craint lui "qu'on réduise les charges" du groupe "pour répondre aux besoins de Natixis", avec des conséquences pour l'emploi.
M. Pérol s'est engagé début juin à ne recourir qu'à des départs volontaires en cas d'éventuelles réductions d'effectifs.
La cour d'appel de Paris a reproché à la caisse d'épargne francilienne de n'avoir fourni à son comité d'entreprise "que des généralités quant à la description du projet". Elle a aussi noté que la direction n'avait établi aucune situation prévisionnelle de l'emploi alors que M. Pérol avait évoqué en mars l'existence de "doublons sur lesquels des synergies seraient réalisées".