Sept actuels ou anciens dirigeants d'Airbus et d', dont son ancien coprésident Noël Forgeard, ont été épinglés pour des délits d'initiés dans le cadre du programme A380 par un rapport du gendarme de la bourse, qui préconise de fortes amendes à leur encontre.
Le rapporteur de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers (AMF) a rendu mardi ses conclusions, que l'AFP a consultées, le jour-même où le groupe EADS, maison-mère d'Airbus, annonçait des résultats en hausse au deuxième trimestre.
Pour le rapporteur, Antoine Courteault, les dirigeants d'EADS qui disposaient début 2006 d'informations sur les retards du programme A380 et ont exercé leurs options de vente en mars 2006, soit sept personnes au total, sont susceptibles d'avoir commis des délits d'initiés.
En revanche, l'actuel PDG d'Airbus, Thomas Enders, et son prédécesseur, Gustav Humbert, sont mis hors de cause par le rapporteur ainsi que les actionnaires de contrôle d'EADS, les groupes Lagardère et DaimlerChrysler.
Principal dirigeant visé par le rapporteur, Noël Forgeard, qui a réalisé une plus-value de 3,7 millions d'euros en vendant les 9 et 15 mars 293.000 stock-options. Or pour le rapporteur, M. Forgeard et les six autres dirigeants ont été informés de retards dans le programme du gros porteur dès le 17 février.
Ce n'est que le 13 juin 2006 qu'Airbus annonçait un retard de six à sept mois du calendrier de livraisons de l'A380. Cette annonce entraînait le lendemain une chute de plus de 26% du cours de l'action EADS et trois semaines plus tard la démission de M. Forgeard. Le rapporteur préconise que la commission des sanctions inflige une amende de 5,45 millions d'euros à l'encontre de M. Forgeard.
"Nous démontrerons que les personnes visées doivent, comme les actionnaires industriels et comme les autres dirigeants, être entièrement mises hors de cause", a réagi un porte-parole de M. Forgeard.
Son également visés: Jean-Paul Gut, l'ancien directeur général délégué d'EADS, le directeur commercial d'Airbus John Leahy, le directeur du site EADS de Dresde, Andreas Sperl, ainsi que trois autres responsables d'Airbus Erik Pillet, Alain Flourens et Olivier Andriès.
Le rapporteur considère également qu'EADS n'avait pas communiqué "dès que possible" au marché l'information sur les retards de l'A380: il propose donc une sanction de 700.000 euros à l'encontre du groupe européen.
EADS a déclaré qu'il continuerait à "assurer sa défense" et a confirmé sa "confiance" à ses "cadres mis en cause dans cette affaire".
Au total, 10 des 17 personnes mises en cause dans un précédent rapport de l'AMF en octobre 2007 sont blanchies par le rapporteur.
Au début de son enquête, l'AMF considérait que les perspectives financières d'EADS -pessimistes en interne- et le programme A350 avaient également donné lieu à des délits d'initiés, susceptibles de concerner ces 10 personnes.
Mais le rapporteur relève "l'absence de précision de l'information" et "estime dès lors qu'il ne peut être considéré que l'information en cause aurait été susceptible d'avoir une influence sur le cours d'EADS (...) dans le cas où elle aurait été portée à la connaissance du public".
Il revient maintenant à la commission des sanctions de se prononcer à l'issue de l'audition des sept dirigeants qui doit se dérouler fin novembre, selon des sources proches du dossier.
Selon l'une d'elle, le rapport publié mardi "influencera forcément la commission des sanctions et le dossier pénal".
A ce stade de l'enquête pénale ouverte parallèlement à celle de l'AMF, cinq personnes ont été mises en examen, dont Noël Forgeard. L'une d'elle, Gustav Humbert, est poursuivie sur le plan pénal pour délit d'initié mais blanchi par le rapporteur de l'AMF.