Le nouveau président russe Vladimir Poutine a renoncé à aller à un sommet du G8 aux Etats-Unis arguant de la nécessité de former un nouveau gouvernement, une explication jugée peu convaincante sur fond d'un bras de fer russo-américain autour de la contestation en Russie.
C'est le Premier ministre et ex-chef de l'Etat Dmitri Medvedev qui représentera la Russie à ce sommet les 18 et 19 mai à Camp David, qui aurait dû être le premier déplacement à l'étranger de M. Poutine depuis son investiture le 7 mai.
"Au cours d'une conversation téléphonique avec le président américain Barack Obama, M. Poutine a informé son homologue qu'il ne pourra malheureusement pas participer au sommet du G8 parce que la formation du gouvernement ne sera probablement pas terminée d'ici là", a indiqué un communiqué du Kremlin.
"La partie américaine a accueilli avec compréhension cette information", souligne le service de presse.
"D'ici la mi-mai, le Premier ministre présentera au président des propositions concernant la composition du gouvernement. Ensuite le chef de l'Etat entamera les consultations avec les personnes proposées par le Premier ministre", a souligné la porte-parole du Kremlin Natalia Timakova citée par l'agence Interfax.
Le fait que M. Medvedev représentera la Russie "témoigne de la continuité de la politique extérieure russe", a-t-elle ajouté.
M. Medvedev, président de 2008 à 2012, est devenu Premier ministre mardi à la place de M. Poutine, en conformité avec la permutation des postes annoncée en septembre dernier par les deux hommes.
Selon le conseiller économique du Kremlin et sherpa des G8 et G20, Arkadi Dvorkovitch, Poutine tout comme Medvedev "ont une immense expérience de participation aux sommet du G8 et peuvent remplir cette fonction de manière efficace".
La présidence russe confirme aussi que MM. Poutine et Obama auront une rencontre bilatérale en marge du sommet du G20 au Mexique les 18 et 19 juin comme l'a annoncé auparavant la Maison Blanche.
Cette annonce intervient après des violences sans précédent et des interpellations musclées d'opposants russes au cours des manifestations des derniers jours en Russie pour dénoncer l'investiture de M. Poutine, critiquées par les Etats-Unis.
Pour Maria Lipman, analyste du centre Carnegie de Moscou, l'histoire de la composition du nouveau gouvernement "est peu convaincante et le fait que le Premier ministre Medvedev soit envoyé à ce moment aux Etats-Unis ne fait que renforcer cette impression".
La nécessité de former un gouvernement n'empêche pas le président élu français François Hollande qui prend ses fonctions le 15 mai d'aller aux Etats-Unis, note-t-elle.
"Vladimir Poutine ne veut pas être confronté aux questions désagréables de ses collègues et de journalistes étrangers qui ont suivi de près les évènements entourant son investiture", ajoute l'analyste.
En outre "il éprouve à l'égard des Etats-Unis une forte méfiance qui risque de ne pas disparaître", estime-t-elle.
M. Poutine, élu le 4 mars et investi à la présidence le 7 mai, se montre régulièrement très critique vis-à-vis des Etats-Unis, accusant Washington d'avoir aidé ou financé le mouvement de contestation en cours depuis cet hiver et qui est sans précédent depuis son arrivée au sommet du pouvoir en 2000.
Les Etats-Unis se sont notamment dits "perturbés" mardi par les images de violences policières contre des manifestants pacifiques en Russie.
Depuis dimanche, des centaines d'opposants au pouvoir russe ont été interpellés par la police russe. Ils dénoncent l'investiture lundi à la présidence de M. Poutine, élu en mars au cours d'un scrutin marqué par des fraudes, selon eux.